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prima le désir d’aller de l’autre côté de la montagne observer le camp et la position de l’ennemi. Tous s’empressent de le suivre, car leurs avis n’ont pu le détourner de cette course téméraire, et du haut de la petite montagne ils voient la partie méridionale de la vallée couverte de villages et de forêts.

Quelques éclaireurs vont avertir Liéou-Yao que le chef de l’armée opposée vient de s’aventurer avec une faible escorte jusqu’au sommet de la colline d’où il observe le camp. Celui-ci craint un piége, il se défie de l’esprit prudent et rusé qu’il suppose au jeune héros et hésite à le faire poursuivre. Mais Tay-Ssé, hors de lui, s’écrie : « L’occasion est favorable, ne la laissez pas échapper ; en retrouverons-nous jamais une pareille ? »

Et à ces mots il monte à cheval, armé de pied en cap, la lance au poing, en disant à haute voix : « Qui a du cœur me suive ! » Ses généraux restent immobiles, à l’exception d’un officier, commandant d’une petite division. « Tay-Ssé est un héros, dit-il hardiment, et je veux m’associer à ses exploits. » Et il lança son cheval au milieu des rires de tous les chefs de l’armée.

Cependant Sun-Tsé avait examiné longtemps, du haut de la colline, le camp ennemi, et Tching-Pou lui conseillait de revenir à ses retranchements. Comme ils doublaient la petite montagne, une voix qui partait du sommet leur crie : « Sun, arrête, arrête ! » Sun-Tsé se retourne et aperçoit deux cavaliers qui descendent vers lui à bride abattue. Avec ses treize hommes d’escorte, il leur barre la route, et la lance en arrêt, il attend ses adversaires au pied de la colline. »

« Tu es bien Sun-Tsé, lui crie le chef ennemi. — Et toi, qui es-tu ? demande le jeune héros. — Je suis Tay-Ssé de Tong-Lay, et je viens pour te tuer. — Oh ! répond Sun avec un sourire de mépris, vous êtes deux ; me voici, attaquez-moi ensemble, car je ne vous crains guère. Si j’avais peur je ne serais pas un héros digne de renommée.

— Prends avec toi tout ton monde, répliqua Tay-Ssé, je n’aurai pas peur non plus. » Et lançant son cheval, il se jette, la lance au poing, sur Sun-Tsé.

Celui-ci se précipite à sa rencontre. Les deux chevaux se heur-