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le sceau héréditaire des empereurs, le cachet de jade que mon père m’a légué[1] ; je le lui laisserai en gage. — Et depuis longtemps celui-ci le convoite, répliqua Liu-Fan.

Le lendemain, Sun-Tsé va trouver Youen-Chu. « Pourquoi ces larmes ? » lui demanda Youen-Chu en le voyant pleurer ; et le jeune ambitieux répondit : « La mort de mon père n’est pas vengée encore. Le frère cadet de ma mère, poursuivi par Liéou-Yao, gouverneur de Yang-Tchéou, se trouve dans une position bien critique. Ma mère, mes jeunes frères, toute ma famille retirée à Kio-Ho, est exposée à la vengeance de notre ennemi ; vous, mon père adoptif, me prêteriez-vous volontiers un secours de mille soldats avec lesquels je pourrais traverser le Kiang, rejoindre ma vieille mère et aller délivrer son frère à Yang-Tchéou ?… Me croirez-vous si je vous promets de vous les ramener ? Je crains que non… Tenez, voici le sceau des empereurs que je vous laisse en dépôt. »

À ce mot de sceau des empereurs, Youen-Chu avança la main, saisit le joyau précieux, le regarda, et répondit transporté de joie : « Je ne vous le prends pas ; laissez-le-moi ici, en dépôt, je vous prête trois mille fantassins, cinq cents chevaux. Après l’expédition, revenez au plus vite avec ces troupes auxiliaires. Votre réputation n’est pas assez faite encore pour que je vous confie une grande armée, mais recevez le titre d’inspecteur des troupes et de général. »

Au jour fixé, Youen-Chu fit tenir prêts les trois mille hommes qu’il prêtait à Sun-Tsé ; le jeune héros prend congé de son chef en le remerciant, et aussitôt, désignant pour le suivre les deux officiers dévoués à sa fortune, Tchu-Tchy et Liu-Fan, les anciens lieutenants de son père, Tchang-Pou, Hwang-Kay et Han-Tang, il choisit un jour heureux et se mit en campagne.

À peine la petite troupe était-elle arrivée à Ly-Yang, qu’à la tête d’un corps armé se présente un personnage qui met pied à terre devant Sun-Tsé. Celui-ci voit un guerrier au visage éclatant comme le jade, aux lèvres brillantes comme le vermillon ;

  1. Voir liv. II, p. 105.