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Tchang-Fey d’être sobre et de ne pas négliger le soin des affaires ; et quand il lui eut donné bien de bons avis, il s’éloigna de Su-Tchéou avec trente mille hommes, infanterie et cavalerie, se dirigeant vers Nan-Yang.

De son côté, Youen-Chu, instruit de l’ordre en vertu duquel marchait Hiuen-Té, supposait ce général animé par l’espoir de s’emparer du pays, et, dans sa colère, il s’écriait : « Oh ! vous, héros, fabricant de nattes et vendeur de pantoufles[1], vous osez songer à envahir les grandes villes, aller de pair avec les grands de l’Empire. Moi j’ai raison de marcher contre vous, et vous, vous n’êtes qu’un pervers, un rebelle, en méditant ma ruine. » Et il ordonna à son général Ky-Ling de mettre sur pied cent mille hommes pour attaquer Su-Tchéou.

Ce fut à Hu-Y que les deux armées se rencontrèrent ; Hiuen-Té, à cause de l’infériorité numérique de la sienne, adossait son camp aux montagnes et à la rivière. Ky-Ling, né dans le Chan-Tong, portait un lourd cimeterre à trois pointes ; bien des généraux combattaient sous ses ordres. Ce jour-là il sortit des rangs pour provoquer Hiuen-Té.

« Grossier paysan, disait-il, oses-tu bien envahir notre territoire ? — J’obéis aux ordres de l’empereur, qui m’enjoint de punir les rebelles, répondit celui-ci, et pour un rebelle, il n’y a pas d’autre châtiment que la mort ! » Déjà Kouan-Kong s’est écrié : « Me voilà ! » Et il s’élance furieux contre Ky-Ling, qui brandissait son sabre en menaçant Hiuen-Té.

Après un combat assez long, Ky-Ling s’arrête pour prendre haleine ; Kouan rentre dans les rangs et l’attend, toujours à cheval ; mais le général ennemi ne reparaît plus, il envoie à sa place son lieutenant Sun-Tching. — Dis à ton chef de venir, lui crie Kouan, c’est lui que je veux vaincre. — Toi-même, tu n’es qu’un officier sans renom, répliqua Tching, indigne de te mesurer avec mon général. » À ces mots Kouan, transporté de fureur, attaque son adversaire et le renverse du premier coup. Les troupes de Hiuen-Té remportent une victoire éclatante, et

  1. On se rappelle la profession première de Hiuen-Té.