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— Je ne vous ai rien fait, » répliqua Liu-Pou ; d’une part Hiuen-Té renvoya Tchang-Fey, de l’autre il emmena Liu-Pou au fond de son hôtel pour lui expliquer tout ce qui venait de se passer. « Tsao est un monstre qui sème la discorde entre les frères, s’écria Liu-Pou en pleurant. — Calmez-vous, mon frère aîné, répondit Hiuen-Té, je ne veux pas suivre ses conseils ; j’ai dans mon district quelques provisions pour les soldats et les chevaux, tout cela, je vous le donne. »

Liu-Pou s’inclina pour remercier cet homme de bien qui lui servit un excellent déjeuner et l’accompagna jusqu’en dehors de ville. Là ils se séparèrent ; après avoir poliment salué son hôte, Liu-Pou retourna dans la ville de Siao-Pey.

Tchang-Fey témoigna son mécontentement de ce que Hiuen-Té l’avait empêché d’accomplir son dessein meurtrier, mais celui-ci répondit : « Tsao a conçu quelque ombrage de nous voir, Liu-Pou et moi, dans le même lieu ; il a voulu nous détruire l’un par l’autre, afin de triompher plus complètement de celui qui survivrait ; mettant en pratique cet adage que deux pouvoirs ne peuvent s’élever l’un devant l’autre. — C’est vrai, répondit Kouan-Kong. — Mais, ajouta Tchang-Fey, je voulais tuer le traître pour couper court à bien des inquiétudes. — Ce serait une action indigne d’un grand homme, » répondit Hiuen-Té, et il alla trouver à l’hôtel des postes l’envoyé de la cour, auquel il remit, après lui avoir témoigné sa reconnaissance pour les bienfaits de l’empereur, une lettre de remerciements adressée à Tsao. Dans cette lettre, il lui demandait le temps de réfléchir sur sa conduite ultérieure.

Quand Tsao apprit par l’envoyé le mauvais succès de cette mission, il pria Sun-Yo de lui suggérer un autre moyen. « Je l’ai trouvé, répondit le conseiller ; c’est la ruse qui consiste à lancer le tigre sur le loup pour qu’il le dévore. » Et quand il eut développé son plan à Tsao, celui-ci l’adopta et songea à le mettre à exécution.

Un exprès fut dépêché près de Youen-Chu pour lui demander la paix ; un second se rendit près de Hiuen-Té pour lui porter l’ordre de s’emparer de Nan-Yang (soumis à Youen-Chu) ;