Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 1, Duprat, 1845.djvu/32

Cette page a été validée par deux contributeurs.

puis que le jeune empereur est captif dans son palais, où le ministre Tsao le tient enfermé.

Cette fois, le roi de Ou, Sun-Kiuen, se ligue avec Liéou-Pey ; celui-ci retrouve dans la considération qui l’entoure, dans le respect des peuples pour son courage et sa fidélité, les éléments d’une puissance durable qu’il semble fuir toujours par modestie et par dévouement à la cause impériale. Mais, près de lui, il y a un docteur de la secte des Tao-Ssé, doué de facultés surnaturelles, du nom de Tcho-Kou-Liang. Ce personnage extraordinaire, arraché à sa retraite, devient grand administrateur et grand homme de guerre. Fécond en ruses qui vont jusqu’à la magie, il soutient la fortune de Liéou ; c’est à lui qu’appartient à peu près le rôle principal dans la dernière partie du San-Koué-Tchy. Le docteur magicien détruit les flottes de Tsao, triomphe sur tous les points, déjoue les combinaisons d’un ennemi habile, et affermit son maître dans la petite principauté qu’il gouverne. Ici le roman semble l’emporter sur l’histoire : l’écrivain voulant, au sein de l’anarchie, soutenir le héros qui représente son principe, fait intervenir en sa faveur les pouvoirs surhumains ; il met à son service des armes divines en harmonie avec son caractère plus grand que celui d’un mortel. Là où il y a interrègne dans l’empire, le narrateur arrange les événements un peu à sa manière et se croit plus libre de disposer les scènes au gré de son imagination. Plus que jamais, dans cette partie de l’ouvrage, le poëte a détrôné le chroniqueur. Cependant Tcho-Kou-Liang n’est pas un personnage imaginaire ; les découvertes dans l’art militaire que lui attribue le romancier se trouvent confirmées par la tradition[1].

  1. Voir Mémoires sur les Chinois, art militaire, vol. VII.