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lors de l’occupation de Yen-Tchéou, Tsao m’a nommé à un emploi de son armée ; aujourd’hui, en vous voyant à la tête des troupes, j’ai été bien frappé de votre aspect martial, et tout joyeux de vous retrouver ainsi, je suis venu, au risque de mes jours, vous donner quelques avis. Que peut gagner un héros de votre trempe à servir un Yang-Fong, un Han-Sien ! Tsao est bien un autre général et le premier homme de guerre de nos temps. Par sa valeur il a soutenu la dynastie et sauvé le peuple opprimé ; maintenant l’idée de vous faire attaquer, de vous tuer peut-être à la tête de vos rangs lui répugne trop, et il m’envoie vers vous. Ne tournerez-vous pas le dos aux ténèbres pour suivre la lumière !

— Je sais, répondit Hwang avec un long soupir, que mes chefs n’ont pas d’avenir ; mais il y a longtemps que je suis leur parti faute de mieux, et il m’en coûte de les quitter.

— Vous ignorez donc le proverbe : L’oiseau intelligent choisit le bois sur lequel il se pose, le serviteur éclairé choisit le maître auquel il se donne. Tous les gens de quelque valeur connaissent cet adage ; celui qui ne le met pas en pratique n’est qu’un homme médiocre.

— Eh bien ! reprit Hu-Hwang en se levant, me voilà prêt ; que voulez-vous de moi ?

— Que ne tuez-vous vos deux généraux ? ce serait acquérir tout d’abord un grand mérite.

— Quoi ! reprit l’officier, assassiner mes chefs, ce serait une déloyauté dont je suis incapable.

— Très-bien, voilà une vertu à toute épreuve, » reprit Tchong un peu déconcerté, et tous les deux ils firent route vers le camp de Tsao avec les quelques hommes que Hwang entraîna dans sa défection.

Instruit de son départ, Yang-Fong se jeta sur ses traces avec mille chevaux d’élite. Des torches éclairaient la montagne du haut en bas. « Voilà l’occasion d’en finir avec ces brigands que nous poursuivons depuis si longtemps, cria Tsao, ne les laissons pas échapper. » Et plaçant de chaque côté des soldats en embuscade, il fit marcher toute son armée à la rencontre des rebelles.