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les supplier de licencier leurs troupes ; au moins Sa Majesté pourrait sauver sa personne auguste. » Et tandis qu’il s’en allait accomplir cette périlleuse mission, Ly-Yo pria l’empereur de venir prendre quelques jours de repos au camp de Yang-Fong ; puis, Yan-Piéou le conduisit à Ngan-Y, aujourd’hui Kiay-Tchéou.

Dans cette petite ville, il n’y avait pas de maisons à étages ; le souverain et sa cour furent réduits à habiter une chaumière qui n’avait pas de porte que l’on pût fermer ; on l’entoura d’une palissade faite avec des branches épineuses. C’est dans cette chaumière que le successeur des Han, Hiao-Hien-Ty, avec ses grands dignitaires, tenait sa cour et réglait les affaires de l’État. Les deux généraux en chef de cette armée, Ly-Yo et Han-Sien, se tenaient en dehors de l’enclos avec leurs troupes, et gardaient la personne du souverain ; ils le gouvernaient et se faisaient craindre ; et les chefs de l’armée voyaient avec joie toute l’autorité passer entre leurs mains. Les mandarins civils qui osaient les calomnier ou mal parler d’eux à l’empereur étaient punis de mort. Le malheureux prince ne recevait de ces généraux, pour ses repas, autre chose que du vin trouble et de mauvais riz ; mais il se soumettait à ces humiliations avec une résignation forcée.

Il arriva aussi que Ly-Yo et Han-Sien accueillirent des sorciers bons à rien, des empiriques vagabonds ; leur nombre s’élevait à deux cents ; ils en firent des officiers de l’armée, des conseillers dans les affaires civiles. Les sceaux gravés ne pouvaient suffire à tant de nominations ; on en traça les caractères avec une alêne, tant il y avait de négligence et de désordre dans cette petite cour.

Cependant Han-Sien alla trouver Ly-Kio et Kouo-Ssé ; il obtint d’eux la mise en liberté des mandarins et des officiers du palais, faits prisonniers au sortir de la capitale. Cette année là, l’Empire fut en proie à une horrible famine ; le peuple n’avait à manger que les fruits du jujubier et des plantes potagères ; les cadavres des gens morts de faim couvraient la plaine. Tchang-Yang et Wang-Y (gouverneurs du Ho-Neuy et du Ho-