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troupes ; vidons le différend à nous deux, s’écria Ly-Kio avec colère ; la personne de l’empereur appartiendra à celui qui vaincra l’autre. » Kouo-Ssé s’est précipité la lance au poing ; Ly-Kio court à sa rencontre armé d’un cimeterre. Vingt fois ils s’attaquent sans pouvoir se vaincre ; et le commandant des gardes, Yang-Piéou, fouettant son cheval, se jette entre les deux combattants. « Ly-Kio, s’écrie-t-il, arrêtez ! Laissez le vieux mandarin prier les grands de la cour de rétablir la paix entre vous ! »

Aussitôt les deux rivaux se retirent sous leurs tentes ; Yang-Piéou et son collègue Tchu-Tsuen rassemblent soixante mandarins de la cour ; c’est près de Kouo qu’ils se rendent d’abord pour l’exhorter à la paix ; et, quand ils sont tous sous sa main, celui-ci les enferme. « Que voulez-vous faire ? demanda Piéou. — Ly-Kio a enlevé l’empereur, répond le général, ne puis-je donc enlever la cour ? — Quoi, s’écria Piéou, l’un s’empare du prince, l’autre des magistrats, quelle conduite est-ce là ! » et Ly-Kio, irrité, voulait le tuer à l’instant. Un officier (du nom de Yang-My) le calma ; il y eut une délibération dont le résultat fut la mise en liberté de Yang-Piéou et de Tchu-Tsuen ; les autres mandarins restèrent en otage dans le camp.

« Nous, magistrats de l’empereur, dit Piéou à Tsuen, nous ne pourrons aider et sauver le prince notre maître ! C’est en vain que nous avons été mis sur la terre. » Ils se jetèrent en pleurant dans les bras l’un de l’autre, et s’évanouirent par l’excès de leur douleur. Rentré chez lui, Tsuen fut saisi d’un tel chagrin qu’il mourut. Dès lors, les deux adversaires s’attaquèrent journellement ; dans ces combats, livrés pendant cinquante jours consécutifs, combien de soldats périrent ! On ne peut en savoir le nombre. Ly-Kio passait sa vie dans les plaisirs, au milieu des pratiques déshonnêtes et superstitieuses d’une fausse religion ; sans cesse il employait des magiciennes qui battaient le tambour pour faire descendre au milieu de l’armée les esprits célestes. Le petit empereur coulait ses jours dans les larmes.

Cependant Yang-Ky, un de ses conseillers, lui exposa que Kia-Hu, quoique dévoué à Ly-Kio, n’avait pas oublié son em-