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asile. Son fils Ly-Sien, chargé du commandement des gardes, entraînait, pendant ce temps, la personne de l’empereur jusque dans cette fameuse ville de Meï-Ou. Les officiers, compagnons fidèles du prince, les employés de la cour, qui se pressaient pèle mêle dans cette place, y mouraient de faim ; et l’empereur ayant fait demander pour sa suite cinq boisseaux de blé et cinq mesures d’os de bœuf, Ly-Kio lui répondit avec colère : « Qu’ont-ils besoin de ces provisions ? on leur sert du riz le matin et le soir. » Et il accorda quelques os, mais dont personne ne voulut manger après les avoir sentis.

« Est-ce ainsi qu’on me traite ! s’écria avec amertume le petit empereur. — Sire, reprit un des conseillers nommé Yang-Ky, Ly-Kio est né sur les frontières, il est habitué aux usages des Mongols ; les malheurs d’aujourd’hui lui ont presque perdu la tête ; son intention est de conduire Votre Majesté à Hwang-Pé pour adoucir sa triste position. Supportez donc avec patience ses paroles un peu vives, sire ; est-ce le cas de faire ressortir ainsi sa faute ? » L’empereur baissa la tête et ne dit rien, mais les larmes coulaient en abondance sur sa manche aux armes du dragon.

Tout à coup on vient annoncer l’approche d’un corps de cavaliers armés de lances et de sabres qui étincellent au soleil. Le roulement des tambours ébranle les cieux ; ces troupes s’avancent pour délivrer l’empereur ; ce sont celles de Kouo-Ssé. Cette nouvelle a un peu calmé les angoisses du prince Déjà, de grands cris s’élèvent hors des murs de la ville ; les deux armées sont en présence. Les deux rivaux s’élancent hors des lignes et se provoquent par des reproches sanglants. « J’avais mis en toi toute ma confiance, s’écrie Ly-Kio, pourquoi donc songeais-tu à me faire périr ? — Toi, tu n’es qu’un rebelle, répliqua Kou-Ssé, pourquoi ne me serais-je pas mis en devoir de t’attaquer ? — Je n’ai fait que protéger la personne du prince, reprit Ly-Kio, est-ce là porter les armes contre le souverain ? — Non, tu as enlevé l’empereur, ton assertion est fausse, répondit Kouo-Ssé, est-ce là ce que tu appelles protéger le prince ? »

« À quoi bon tant de paroles ; nous n’avons pas besoin de nos