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Les soldats de Tien allèrent bien vite porter la nouvelle de ce qui se passait à Tsao-Tsao ; le général, étonné et mécontent, arrive avec ses troupes pour s’assurer par ses yeux de la vérité du récit qu’on lui a fait. Le lendemain, le chef de partisans n’hésita pas à marcher contre Tsao lui-même. Frappé de sa physionomie presque surhumaine, de son allure imposante et terrible, Tsao ne put s’empêcher d’admirer cet homme ; il conseilla à Tien de feindre une retraite pour l’attirer dans un piége. Celui-ci sort pour combattre et croise longtemps le fer avec le campagnard, qui le poursuit jusqu’aux portes du camp dès qu’il le voit reculer. Les archers et les arbalétriers se retirent en lançant des flèches ; Tsao lui-même emmène ses troupes à près d’un mille en arrière du champ de bataille, et fait creuser un fossé dans lequel il cache ses soldats.

Le lendemain, provoqué par une fausse attaque, le chef de partisans poursuit Tien jusqu’au lieu où quatre généraux se tiennent en embuscade avec des soldats armés de crocs, qui le font rouler dans le fossé, lui et son cheval, le saisissent et le conduisent à la tente de Tsao. Celui-ci, ayant ordonné aux siens de se retirer, dénoua de ses mains les liens du prisonnier, le fit changer d’habits, le pria de s’asseoir et l’interrogea.

« Je me nomme Hu-Tchu (mon surnom Tchong-Kang), je suis de Tchao-Hien, dans le Tchao-Koue, répondit l’inconnu. Au milieu des troubles qui déchiraient l’Empire, j’ai réuni environ mille hommes de ma famille pour me défendre contre les brigands. Un jour, dix mille Bonnets-Jaunes se présentèrent ; ma petite troupe éleva un grand tas de pierres, avec lesquelles j’attaquai moi-même l’ennemi, et le forçai à se retirer ; une autre fois, le village manquait de grains, et les brigands firent un traité avec nous par lequel ils nous donneraient du blé en échange de nos bœufs. Ils vinrent apporter les vivres promis et emmenèrent les bœufs ; mais ces animaux, qui ne tardèrent pas à s’échapper, retournèrent aussitôt à leurs étables. Alors je pris deux queues de bœuf dans ma main et je fis quelques pas en avant ; mais les brigands épouvantés n’osèrent redemander le prix de leurs