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les deux fils du roi seront faits prisonniers. — Non, non, répondit Tching-Yu ; j’ai avec moi deux cent mille soldats fidèles, qu’est-il besoin de recourir à ces ruses ? » Et il méprisa les sages conseils de Ly-Tso-Tché. Han-Sin, en ayant été secrètement instruit, se réjouit de cette heureuse circonstance, et il osa même marcher à l’instant. Arrivé à l’entrée du défilé il fait halte, et au milieu de la nuit ordonne à ses soldats d’avancer. Là, suivi de deux mille hommes sur lesquels il peut compter, armés à la légère, portant chacun un drapeau rouge, il s’enfonce par le sentier et s’adosse à la montagne. « Quand toute l’armée de Tchao se précipitera en masse sur nos pas, dit-il, observez-la bien ; dès qu’elle quittera ses murs, entrons-y nous-mêmes au plus vite, arrachez les étendards qui s’y trouveront et plantez-y les vôtres. » Là-dessus, il envoya ses lieutenants répéter dans les rangs à tous les soldats : « Mangez un peu maintenant, et après avoir vaincu les gens de Tchao vous recommencerez votre repas. » D’abord, il fit partir dix mille hommes et rangea en bataille les troupes embarquées ; en apercevant cette division ennemie, les gens de Tchao se prirent à rire. Mais le lendemain Han-Sin, déployant sa grande bannière, battit la charge, sortit des défilés. Ceux de Tchao s’avancèrent à leur tour et combattirent longtemps ; Han-Sin et Tchang-Eul abandonnèrent la moitié de leurs étendards et de leurs tambours, et s’enfuirent vers les troupes embarquées sur le fleuve. Aussitôt celles de Tchao quittent leurs murailles en masse pour harceler les fuyards ; mais les cavaliers de Han-Sin ont saisi l’occasion. Ils entrent dans la ville déserte, enlèvent les étendards qui s y trouvent et y plantent la bannière de Han. Les troupes embarquées combattirent avec désespoir ; l’armée de Tchao était en déroute. Quand les soldats vaincus voulurent, sous les ordres de Tchin-Yu, retourner à leurs remparts, ils y virent flotter la bannière du vainqueur. Tchin-Yu lui-même, frappé d’épouvante et de surprise, se sauva sans savoir où il allait ; les gens de Han l’attaquèrent avec leurs forces réunies, le défirent et lui coupèrent la tête. Plus de deux cent mille hommes se soumirent à Han-Sin, et le roi de Tchao, Wang-Hie, fut fait prisonnier