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dans un pays en proie aux guerres civiles ; le sabre en main, l’œil ouvert sur ce qui se passe, vous pouvez aussi prendre rang parmi les généraux qui cherchent l’indépendance. N’auriez-vous pas honte, au contraire, de subir la domination des autres ? Voyez, Tsao-Tsao s’efforce de soumettre les provinces de l’orient ; tout ce pays attend un maître. Vous avez avec vous ce Liu-Pou, l’un des héros de notre époque, un guerrier sans rival ; retenez-le au passage et employez-le à conquérir le Yen-Tchéou. Regardez bien l’aspect des événements pour connaître le moment propice, et il ne tiendra qu’à vous d’être le premier parmi les grands vassaux ! »

Dans la joie que lui causait une perspective si attrayante, Tchang-Miao arrêta Liu-Pou au passage, et le regarda comme un auxiliaire que le ciel même lui envoyait ; il le fit gouverneur de Yen-Tchéou. Tchang-Miao se rendit aussi maître de Po-Yang ; mais, dans cette province qu’il enlevait à Tsao, trois villes, défendues par Sun-Yo et par Tching-Yo, les deux meilleurs conseillers militaires de ce général, résistèrent opiniâtrement. Ces trois villes étaient Yen-Tching, Tong-Ho et Ouan-Hien, tout le reste de la province fut pris. Tsao-Jin, battu dans plus d’une rencontre, se vit bientôt sur le point de succomber.

« Si je perds le Yen-Tchéou, dit Tsao-Tsao, il ne me reste plus aucun lieu de refuge ! » Et le conseiller militaire Kouo-Kia vit dans cet incident fâcheux l’occasion de montrer à Hiuen-Té de grands dehors de justice. « Retirez, comme si vous agissiez au nom de l’humanité, vos troupes de devant Su-Tchéou, dit-il à Tsao ; retournez vers le pays de Yen pour effacer le déshonneur qu’une défaite imprimerait à votre nom !… » Et Tsao, goûtant ce conseil, répondit à la lettre de Hiuen-Té par les lignes suivantes :

« Après le malheur dont mon père, l’honneur d’une famille illustre depuis tant de siècles, a été victime, pouvais-je ne pas le venger ? non ; j’avais donc levé des troupes pour faire expier à Tao-Kien un crime odieux ; je voulais laver cette insulte dans le sang de sa famille tout entière. Mais en recevant la lettre de Hiuen-Té, du rejeton de la famille impériale, si orné