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Tchang-Fey se jette à sa rencontre ; les deux champions se heurtent ; les armées poussent de grands cris ; Hiuen-Té arrête son cheval et regarde.


II.[1]


Pendant que les deux champions luttent ainsi, Hiuen-Té crie à ses soldats d’avancer, et bientôt Yu-Kin mis en déroute est harcelé par son terrible adversaire, par Tchang-Fey, qui arrive en le poursuivant jusqu’au pied des murailles. Du haut des remparts, les assiégés ont vu la bannière rouge sur laquelle se détachent en caractères blancs ces mots : Hiuen-Té de Ping-Youen. Aussitôt Tao-Kien envoya un de ses officiers ouvrir la porte au héros et à l’armée libératrice. Il accueillit Hiuen-Té dans son palais, lui témoigna les plus grands égards, et, pendant le banquet qui suivit l’entrevue, il fut frappé de l’air distingué de son hôte, de sa voix retentissante comme une cloche. Dans sa joie, Tao-Kien chargea son conseiller My-Tcho d’aller lui offrir le gouvernement de sa province.

« Seigneur, à quoi pensez-vous ? répondit Hiuen-Té. — Aujourd’hui, répondit le vieux Tao-Kien, l’Empire est en proie à l’anarchie, l’empereur n’est qu’un faible enfant, le pouvoir reste aux mains de ministres pervers. Vous, seigneur, vous descendez des Han, votre devoir est de soutenir la dynastie chancelante. Quant à moi, vieillard âgé de plus de soixante ans, sans vertus, sans capacité, je ne puis résister aux périls qui me menacent jour et nuit. Votre nom, seigneur, est grand dans tout l’Empire, on vous regarde comme le modèle des héros de votre temps ; gouvernez le Su-Tchéou, je vous le cède. J’en donnerai avis à l’empereur ; non, vous ne me refuserez pas. — Bien que descendant des Han, répondit Hiuen-Té en se prosternant avec modestie, je n’ai ni mérite ni talents supérieurs.

  1. Vol I, livre III, chap. II, p. 23 du texte chinois.