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traverse au galop les lignes ennemies. Semant la mort autour de lui, frappant à gauche, tuant à droite, cet étranger se fraie un passage comme s’il dissipait des fantômes, arrive au pied des murs, et demande qu’on lui ouvre les portes. Kong-Yong ne connaît pas cet homme, et il n’ose lui accorder l’entrée. Déjà un des chefs rebelles s’est mis à sa poursuite, il le serre de près au bord des fossés, et l’inconnu se rejetant sur ceux qui le poursuivent en a renversé une douzaine, lorsque Yong fait ouvrir la porte et ordonne aux siens d’aller à sa rencontre. Laissant dehors son cheval et sa lance, l’officier monte sur les murs de la ville et va saluer Kong-Yong.

Ce héros est remarquable par sa haute taille, sa longue barbe, ses grands bras ; il excelle à tirer de l’arc. Quand Kong-Yong lui demanda ses noms, il répondit : « Ma vieille mère a reçu de votre seigneurie des bienfaits signalés. Hier, en sortant de Liao-Tong, j’allais lui rendre mes devoirs, dans notre petite maison, lorsque j’ai entendu le tambour d’airain retentir près de la ville, je l’ai vue assiégée par des brigands ; alors ma mère m’a dit : « Sa seigneurie m’a comblée de ses dons généreux, et jusqu’ici je ne te l’avais pas fait connaître. Mon bienfaiteur est en péril, va, mon fils, va le secourir… — Je me précipite seul, et j’accours remercier votre seigneurie de ce qu’elle a daigné nourrir ma vieille mère. Je suis de la ville de Hwang-Hien, dans le Tong-Lay ; je me nomme Tay-Ssé-Tsé (mon surnom Tseu-Y). » Kong-Yong fut rempli de joie ; il savait que ce Tseu-Y était véritablement un homme héroïque. Sa mère demeurait à quelque distance du chef-lieu, à Tou-Tchang ; elle recevait des étoffes de soie et du riz, que le gouverneur lui envoyait pour soulager sa misère, et voilà ce qui l’avait portée à faire partir son fils.

Une cuirasse et un cheval tout équipé, telle fut la récompense que donna le gouverneur à Tseu-Y ; et celui-ci, comblé d’honneurs, demande un corps de mille hommes d’élite pour aller au-devant des rebelles, car il n’y avait pas d’autre moyen de leur faire lever le siége que de les mettre en fuite. « Malgré votre valeur, répondit Kong-Yong, vous ne devez pas risquer une