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estimé de tous, connaissait les talents supérieurs de Tsao-Tsao et l’importance que ce général venait d’acquérir dans les provinces ; il désirait se lier avec lui, seulement l’occasion ne s’était pas présentée encore. Instruit du passage de Tsao-Song, il sortit de sa ville pour aller au-devant du vieillard, et lui témoigna les mêmes égards qu’à un père. Durant deux jours, il le fêta et lui donna par honneur à son départ du chef-lieu une escorte de cinq cents hommes, aux ordres de Tchang-Kay, commandant de la garnison. Cette petite troupe accompagnait la famille du vieillard, partie en avant. Le gouverneur en personne, se tenant à côté du char qui portait Tsao-Song, le conduisit hors de la ville, et là lui dit adieu.

Le père de Tsao-Tsao se trouvant entre les deux chefs-lieux des districts de Hoa et de Fey, au commencement de l’automne, des pluies abondantes, survenues tout à coup, l’obligèrent à s’abriter dans un vieux temple de bonzes ; les religieux, au nombre de quatre ou cinq, le reçurent avec politesse et le conduisirent dans la cellule du supérieur. Les troupes qui l’escortaient se réfugièrent avec leur chef dans les deux ailes du monastère ; complètement mouillés par ces torrents de pluie, les soldats murmuraient, et Tchang-Kay convoqua les officiers dans un lieu retiré pour se consulter avec eux. « De partisans des Bonnets-Jaunes que nous étions naguères, dit-il, nous voilà devenus serviteurs de Tao-Kien ; là il n’y a pas à espérer grande fortune ; mais, tenez, dans ces chars que nous escortons, quel butin riche et facile ! Cette nuit, à la troisième veille, tuons le vieillard et les siens ; enlevons ses richesses, fuyons dans les montagnes ; on croira que des voleurs ont fait le coup ! »

Cet avis plut aux soldats ; cette même nuit, pendant que la pluie continuait de tomber et le vent de souffler, tandis que le vieillard reposait dans la cellule du religieux, tout à coup on entendit des quatre côtés du monastère de grands cris. Tsao-Té se lève et s’élance dehors le sabre en main ; il tombe au milieu des brigands qui l’égorgent. Malgré son grand âge, Tsao-Song fuit avec sa femme derrière la cellule ; il veut se sauver par-dessus la muraille, mais la vieille n’était pas assez agile pour