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des chemins. Les jeunes filles et les jeunes garçons qui étaient pauvres vendirent leurs vêtements pour acheter de quoi faire un repas de fête ; chacun se félicitait en disant : « Au moins cette nuit nous pourrons tous reposer tranquilles ! »

Le frère et le fils aîné de Tong-Tcho moururent suspendus sur la place du marché par les pieds et par les mains. Tous ceux qui étaient au service du premier ministre furent jetés dans des cachots où ils périrent.

Wang-Yun avait convoqué dans le palais tous les grands mandarins à un banquet solennel pour célébrer le retour de la tranquillité, lorsqu’on vint lui annoncer qu’un homme avait osé embrasser en pleurant le cadavre de Tong-Tcho. « Quand tout le peuple de la capitale se réjouit publiquement de la mort du monstre, dit Wang-Yun, qui donc est assez téméraire pour manifester sa douleur ! » Et il ordonna aux gardes d’aller saisir cet homme.


II.[1]


Bientôt les gardes amenèrent le coupable, et tous les mandarins surpris reconnurent en lui l’historien Tsay-Yong. Wang-Yun l’apostropha avec colère : « Le tyran avait mis la dynastie à deux doigts de sa perte, s’écria-t-il, et vous ancien serviteur des Han, qui vous ont comblé de leurs bienfaits pendant des générations, vous ne songez pas à reconnaître leurs bontés par votre zèle ! Au lieu de vous unir à ceux qui exterminent les rebelles, c’est sur Tong-Tcho que vous pleurez. » Et Tsay-Yong s’excusait en avouant ses fautes. « Je ne suis qu’un insensé, dit-il, mais je connais les devoirs d’un sujet fidèle ! Je ne vois pas sans douleur les révolutions qui jadis et aujourd’hui, ont agité l’Empire ; est-ce donc là renier la dynastie pour embrasser le parti de Tong-Tcho ! S’il m’est échappé des paroles criminelles, dignes d’un fou ou d’un imposteur, si vous me regardez comme un sujet déloyal, coupez-moi les pieds, mais

  1. Vol. I, liv. II, chap. VIII, p. 102 du texte chinois.