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Kouo-Ssé, Tchang-Tsy et Fan-Tchéou. Ils recevaient de riches traitements, et gardaient, avec trois mille soldats d’élite, la ville dont le ministre avait fait sa place forte ; mais dès que leur arriva la nouvelle du meurtre de leur maître et de l’approche de Liu-Pou, ils abandonnèrent la ville et s’enfuirent dans le Liang-Tchéou.

La première chose que fit Liu-Pou en arrivant, ce fut de reprendre en sa possession la danseuse Tiao-Tchan, qu’il ramena à la capitale. À l’instigation de Hwang-Fou-Song, les huit cents concubines de Tong-Tcho, choisies par lui dans des familles honorables, furent assassinées, ainsi que toutes les personnes de sa maison qui se trouvaient enfermées dans cette même ville. Sa vieille mère, âgée de quatre-vingt-dix ans, courut se jeter au-devant des meurtriers en leur demandant grâce ; mais elle les suppliait encore que déjà sa tête roulait à terre. On mit à mort quinze cents personnes, hommes et femmes, attachés au service ou à la famille de Tong-Tcho. Les objets précieux, les immenses trésors, l’or amassé dans cette ville de Meï-Ou, l’argent[1], les étoffes, les pierreries ; toutes ces richesses formaient un amas gros comme une montagne. Il s’y trouvait aussi huit millions de mesures de grains ; Wang-Yun en fit entrer une moitié dans les greniers publics, et distribua l’autre aux soldats.

Quand expira Tong-Tcho, le soleil et la lune brillaient avec éclat, on ne ressentait pas la plus légère brise. Son corps fut jeté, par ordre supérieur, sur la grande route ; comme il était fort gras, les soldats de service placèrent du feu sur son ventre, et allumèrent ainsi une lumière qui éclaira comme une lampe. La graisse du cadavre coulait sur la terre ; le peuple qui passait frappait avec plaisir cette tête abhorrée, jusqu’à ce qu’enfin elle fut réduite en bouillie. Quant à Ly-Jou, on le pendit sur le marché, et la populace qui allait et venait déchirait sa chair à coups de dents. Hors de la ville et dans la ville, jeunes et vieux, tous les habitants chantaient et sautaient par les rues, le long

  1. On trouva dans cette ville de Meï-Ou vingt à trente mille livres d’or, et quatre vingt-dix mille livres d’argent.