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vous percer de sa lance, il a rompu lui-même tous les liens qui attachent un fils à son père. — Seigneur, reprit vivement Liu-Pou, dont la colère s’accroissait par degrés, sans vos excellents avis, j’aurais péri moi-même sous les coups de ce vieux scélérat. — Si vous relevez le trône chancelant des Han, vous agirez comme un fidèle et loyal sujet ; votre nom sera gravé dans les annales de l’Empire, et il traversera dix mille générations, entouré d’une auréole de gloire qui ne s’effacera jamais. Mais, si vous soutenez Tong-Tcho, vous agirez comme un sujet révolté. D’un coup de pinceau, l’inflexible histoire imprimera à votre nom une tache flétrissante, et le conservera jusqu’aux derniers âges du monde, souillé d’un éternel déshonneur ! »

Liu-Pou se prosterna à ses pieds en s’écriant : « Mon parti est pris ; seigneur, gardez-vous d’en douter. — Je crains seulement que, si vous ne réussissez point, vous ne vous attiriez les plus grands malheurs, » répondit Wang-Yun.

Liu-Pou tire son épée, l’enfonce dans son bras, en fait jaillir le sang et jure de se venger. Wang-Yun se précipite à ses genoux, et, après l’avoir remercié : « Puisque tel est votre courage, la dynastie des Han peut se promettre encore un avenir de quatre cents ans, et c’est à vous seul qu’elle devra ce bonheur inespéré. Tenez, général, voici un ordre secret de l’empereur ; gardez-le soigneusement et n’en laissez rien transpirer. Quand le temps sera venu d’accomplir ce dessein, je viendrai vous avertir. » Liu-Pou prend vivement le décret, en donnant sa parole à Wang-Yun, et se retire en silence. Wang-Yun invite le ministre d’état Ssé-Sun-Jouï, l’inspecteur général Hwang-Ouan, et Ssé-Li l’intendant de la cavalerie, à venir délibérer avec lui.

— « Maintenant, dit Sun-Jouï, l’empereur commence à entrer en convalescence ; il faut envoyer à la ville de Meï-Ou un homme habile dans l’art de parler, et inviter Tong-Tcho à venir au conseil. Nous placerons des troupes en embuscade dans l’intérieur du palais, et en arrivant il tombera sous leurs coups. Voilà, je crois, un plan excellent. — Quel homme osera y aller ? reprit Hwang-Ouan.