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voile tombe sur la capitale inquiète, menacée, après la tyrannie des courtisans, d’une anarchie dont le terme est impossible à prévoir. Les dernières figures qu’on aperçoit sur la scène, à travers les piques et les cimeterres, à la lueur des flammes, ce sont celles de deux eunuques qui fuient, en pleine nuit, dans la campagne, entraînant avec eux les deux petits princes, les derniers rejetons de cette dynastie dont ils ont causé la ruine, et qu’ils voudraient emporter dans un pli de leur tunique. Poursuivis dans l’obscurité par des soldats victorieux, les favoris éperdus abdiquent leur orgueil. Le plus fier d’entre eux redevient esclave ; il voit que l’instant du sacrifice est arrivé ; il s’agenouille devant son maître, salue humblement, et pour la dernière fois, les deux petits empereurs tremblants, puis va chercher la mort dans les eaux du fleuve.

La scène se rouvre ; les jeunes princes apparaissent, se tenant par la main, errant au milieu des herbes humides, dans lesquelles ils s’enfoncent et s’égarent. À la tyrannie collective des eunuques intéressés au maintien de la dynastie qui les abrite, succède le despotisme individuel des premiers ministres, des maires du palais, qu’on voit préluder à l’usurpation en déposant leurs maîtres, se gardant bien eux-mêmes de s’asseoir trop tôt sur un trône dont ils montrent à tous la fragilité.

De cette première émeute sortit Tong-Tcho ; quelques avantages remportés sur les Mongols avaient fait connaître ce général ; impétueux, violent, il domine le nouvel empereur, effraie la cour, écarte ses concurrents, et se joue des mandarins civils. Tous les chefs de l’armée, tous les grands personnages de l’empire abandonnent la capitale et se liguent contre le tyran. Réunis au camp de