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ter vos exploits, dont la renommée croissante étonnait mon oreille, comme le bruit du tonnerre que propagent et agrandissent les échos. J’étais remplie de vous, je ne voyais que vous au monde ! Aurais-je pu penser qu’un jour vous vous laisseriez mener par un autre homme ! »

Après avoir prononcé ces paroles, la jeune danseuse verse une pluie de larmes. Les deux amants s’embrassent étroitement, ils confondent leurs pleurs et leurs soupirs et ne peuvent se détacher l’un de l’autre. Cependant Tong-Tcho, qui se trouvait dans le palais, se retourna tout à coup, et, ne voyant plus Liu-Pou, il conçut, au fond de son cœur, les plus cruels soupçons. Il monte sur son char, et retourne à son hôtel ; le cheval de Liu-Pou est attaché à la porte.

Le gardien, interrogé par lui, répond que le général Liu-Pou vient de pénétrer dans l’intérieur du palais.

Tong-Tcho fait retirer les officiers de sa suite, et entre seul dans l’appartement le plus reculé. Il cherche, et ne trouve ni Liu-Pou, ni Tiao-Tchan. Il interroge une servante, qui lui dit : « Tout à l’heure le général est passé par ici, armé de sa lance peinte ; mais j’ignore où il est allé. » Tong-Tcho, poursuivant ses recherches, arrive enfin dans le jardin situé derrière le palais, et voit Liu-Pou appuyé sur sa lance, conversant avec Tiao-Tchan, au bas du pavillon du Phénix. Il court jusqu’à lui et pousse un cri effrayant. Liu-Pou retourne la tête, et, apercevant Tong-Tcho, il est saisi de terreur. Tong-Tcho lui arrache la lance qu’il tenait à la main, mais Liu-Pou s’échappe en fuyant. Tong-Tcho veut le poursuivre et le percer ; mais comme il était chargé d’embonpoint, et que Liu-Pou avait le pied agile, il lui fut impossible de l’atteindre. Frappant du poing la hampe de la lance, Liu-Pou la fait tomber sur l’herbe ; Tong-Tcho ramasse la lance et se met de nouveau à poursuivre Liu-Pou, qui prit bientôt sur lui une avance de cinquante pas. Tong-Tcho sortit du jardin en courant après lui ; mais un homme qui marchait précipitamment dans une direction opposée vint heurter contre la poitrine de Tong-Tcho, et le renversa par terre.