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vous ferai connaître les motifs qui justifient ma conduite. » Liu-Pou suivit Wang-Yun. Arrivé à sa maison, il descend de cheval, et entre avec lui dans un appartement retiré. « Général, lui dit Wang-Yun, pourquoi avez-vous adressé à un vieillard comme moi d’aussi cruels reproches ! — On est venu m’annoncer que vous aviez conduit une jeune femme dans l’hôtel du premier ministre. Si ce n’est pas Tiao-Tchan, qui est-ce ? — Général, vous ignorez ce qui s’est passé. — Comment puis-je savoir le secret de vos affaires ? » répliqua Liu-Pou.

Wang-Yun reprit : « Hier, le premier ministre, se trouvant à l’audience impériale, s’approcha de moi et me dit : « J’ai quelque chose à vous demander ; demain j’irai vous trouver chez vous. » Aussitôt je prépare un petit repas et j’attends son arrivée. Aujourd’hui le premier ministre vient chez moi. « J’ai appris, me dit-il au milieu du repas, que vous êtes père d’une fille nommé Tiao-Tchan, et que vous l’avez promise à mon fils Liu-Pou. Craignant que vous ne pussiez vous décider à ce sacrifice, je suis venu exprès pour vous demander si vous daignerez encore la lui accorder. » Voyant que le premier ministre était venu en personne, je ne pouvais différer un instant de lui obéir. Sur-le-champ je fis appeler Tiao-Tchan, afin qu’elle vînt présenter ses hommages à Son Excellence. « Nous voici dans un jour heureux, me dit le premier ministre ; je désire emmener aujourd’hui ma bru, faire préparer un grand festin, et la marier avec mon fils adoptif. » Réfléchissez vous-même, général. Son Excellence le premier ministre étant venue en personne, comment aurais-je osé repousser sa demande !

— « Seigneur, excusez mon crime, dit Liu-Pou : j’avais mal vu. Je veux venir demain recevoir mon châtiment. » Et Wang-Yun répondit : « Ma fille ne manque pas de robes et d’ornements de tête ; dès qu’elle sera passée dans l’hôtel du général, je me ferai un devoir de vous les envoyer. » Liu-Pou le remercia et prit congé de lui.

Quand la nuit fut venue, Tong-Tcho reçut Tiao-Tchan dans son appartement, et le lendemain à midi il était encore à ses côtés. Liu-Pou vint à l’hôtel du premier ministre pour obtenir