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plus belles filles entre quinze et dix-huit ans, pour être ses servantes et ses concubines, et accumula dans cette ville une quantité immense d’or et d’argent, de perles, d’étoffes de soie et de pierres précieuses.

Tong-Tcho avait coutume de dire : « Si je réussis dans mes projets, je veux m’emparer de l’Empire ; si je ne réussis pas, je garderai cette ville, et j’y passerai le reste de mes jours. »

Toutes les fois que Tong-Tcho sortait, les présidents des tribunaux suprêmes et les ministres étaient obligés de s’agenouiller au bas de son char, et les magistrats qui avaient rendu d’anciens services à l’État ne pouvaient obtenir d’emplois s’ils n’étaient présentés par Tsay-Yong devenu son favori.

Un jour un moniteur impérial, nommé Hwang-Fou-Song, s’étant prosterné devant le char de Tong-Tcho : « Eh bien ! s’écria-t-il, voilà donc Hwang-Fou-Song qui s’incline devant moi ! — Qui aurait pu prévoir que Votre Excellence arriverait au faîte des grandeurs ?

— « L’aigle est né pour prendre un sublime essor ; le passereau qui s’élève à peine au-dessus de la terre ne peut comprendre sa noble destinée.

— « Jadis, seigneur, nous passions pour deux aigles. Aurais-je pu penser que Votre Excellence se changerait en phénix ? »

Tong-Tcho, riant aux éclats répliqua : « Fou-Song, me crains-tu ?

— « Seigneur, si vous honorez les sages, si vous les traitez avec une noble générosité, quel est l’homme qui ne s’empressera pas de vous rendre hommage ! Mais si vous faites des édits cruels, si vous infligez des supplices qui révoltent l’humanité, non seulement Fou-Song, mais même tout l’Empire tremblera devant vous. » Tong-Tcho sourit une seconde fois.

Le tyran résidait avec toute sa maison dans la ville de Meï-Ou. Il en revenait tantôt au bout de quinze jours, tantôt au bout d’un mois. Les grands dignitaires allaient tous le recevoir en dehors de la porte de la capitale appelée Kwang-Men, et se prosternaient devant son char ; et sur toute la route qu’il devait parcourir on étendait par terre de riches tapisseries. À