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la ville sera bientôt à nous : doit-on, pour une bannière renversée, retirer ses soldats ! — C’est la bannière du principal corps d’armée, la vôtre, dit Han-Tang ; le présage est grave ! — Le vent n’est qu’une exhalaison du ciel et de la terre, interrompit Sun-Kien, et parce qu’une brise des premiers jours d’hiver a abattu l’étendard, faut-il perdre courage ! Toute ma vie j’ai commandé des soldats, et jamais de pareilles folies ne m’ont occupé ; au contraire, c’est le cas de donner un assaut général et d’emporter la ville ! »

Pendant ce temps-là, dans les rangs opposés, Kouay-Léang racontait au gouverneur assiégé qu’il avait vu, dans la nuit, l’étoile d’un général tomber à terre, et que c’était infailliblement celle qui présidait aux destinées du chef ennemi. Le dépêche pour Youen-Chao est prête, il faut qu’elle parte, mais qui osera traverser les lignes des assiégeants ? « Moi, » répondit un brave officier du nom de Liu-Kong. — « Eh bien ! dit Kouay-Léang, si vous êtes assez hardi pour cela, écoutez mes avis : prenez avec vous cinq cents archers d’élite ; une fois les lignes passées, gagnez la montagne. L’ennemi vous poursuivra ; laissez alors cent hommes sur les hauteurs pour qu’ils puissent attaquer avec des pierres ; jetez cent archers dans les bois, mais qu’ils laissent approcher ceux qui vous poursuivront, sans bouger ; ils ne devront lancer leurs flèches que quand l’ennemi, engagé dans la montagne, sera ainsi tombé dans le piége. Si vous tuez un chef et que l’ennemi se rende, faites un signal auquel on vous répondra dans la ville en venant à votre secours. Mais si vous sortez sans être attaqué, franchissez plutôt les lignes sans tirer le canon d’alarme. Cette nuit, la lune ne brille guère ; vous devrez partir au crépuscule. »

Kouay-Léang disposa des troupes aux quatre portes de la ville, pour qu’elles fussent prêtes à répondre au signal ; au soir, Liu-Kong était sorti avec ses cavaliers. Du haut des murs, on regarda du côté de l’est, on n’apercevait pas un soldat, pas un cheval ; ce fut par cette porte que Liu-Kong s’échappa furtivement à la tête de sa petite troupe. Il traversait sans bruit les retranchements de Sun-Kien, quand celui-ci entendit, du milieu