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les fleuves et les lacs, ne pourrait déployer ses forces ni tirer parti de son brillant courage. Liéou-Piéou adopta ce plan.

Or, Sun-Kien avait cinq fils et une fille, et aussi un jeune frère, Sun-Tsing (surnommé Yeou-Tay[1]), qui, au moment où il allait partir à la tête des troupes, vint le saluer avec tous ses enfants, et il lui donna ce conseil : « Le pouvoir est aux mains de Tong-Tcho, notre empereur est faible, l’Empire est dans l’anarchie, chacun s’en partage les lambeaux ; le pays à l’est du Kiang conserve seul une apparence, un reste de tranquillité, et, pour une petite vengeance, vous y conduisez des troupes nombreuses ! Cela n’est pas bien, mon frère, songez-y. — Vous n’entendez rien à ces choses, répliqua Sun-Kien ; j’en ai fait le serment, je veux être le maître dans l’Empire, dominer mon siècle, pacifier le peuple. J’ai un ennemi, et je me vengerai de son insulte. Faut-il que je croise les bras et que j’attende la mort ! Je ne suivrai pas un pareil conseil. — Et moi, interrompit l’aîné des cinq fils, Sun-Tsé, je veux suivre mon père ! — Cet enfant, dès son jeune âge, a montré une rare valeur, dit Sun-Kien, il me suivra à la tête de mes troupes. » Tandis que son second frère Sun-Kuen restait avec leur oncle à garder la rive orientale du fleuve, l’enfant intrépide monta sur un bateau et se rendit devant la ville de Fan-Tching. Le chef de l’avant-garde ennemie, Hwang-Tsou, s’était embusqué sur l’autre rive avec une compagnie d’archers, appuyés par d’excellents soldats d’infanterie. Dès qu’il voit les bateaux toucher le bord, il fait pleuvoir sur eux une grêle de flèches ; Sun-Kien ordonne aux siens de ne pas répondre à cette attaque, de rester en bon ordre cachés au fond des barques, et de tenir l’ennemi en alerte par divers mouvements. Au bout de trois jours, Hwang-Tsou avait épuisé toutes ses flèches, et Sun-Kien fit arracher par milliers celles qui s’étaient enfoncées dans le bois des bateaux ; puis, profitant d’un vent favorable, il s’approcha, et ses troupes à leur tour lancèrent

  1. Voici les noms des quatre fils qu’il avait de sa femme légitime Ou : Tsé-Pé-Fou, Kuen-Tchong-Méou, Y-So-Py et Kwang-Ky-Tao. De la sœur cadette de sa femme, il avait une fille Sun-Jin et un fils Lang-Tsao-Ngan. Une autre femme, de la famille Yu, lui donna un sixième fils du nom de Sun-Chao, son surnom Kong-Ly.