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qu’un chien hypocrite, un loup voleur ! Rougissez donc à la face du ciel et de la terre. — Qui veut me l’arrêter ? cria Youen-Chao plein de rage. » À ces mots, Wen-Tchéou s’élance sur le pont, la lance au poing. Sun-Tsan croise le fer avec lui ; mais, au dixième assaut, il a déjà vu que son adversaire est trop redoutable ; il fuit au milieu des siens. Wen-Tchéou l’y poursuit, enfonce les rangs comme si sa lance n’eût rencontré aucun obstacle, sème la mort à ses côtés. Quatre officiers qui entourent Sun-Tsan le défendent avec courage : l’un tombe percé de coups, trois autres fuient ; Wen-Tchéou va trouver enfin l’ennemi qu’il cherche, mais le chef rebelle a quitté ses troupes pour se sauver au galop de monts en collines. Il se précipite à sa poursuite, l’interpelle avec colère et lui crie : « Saute à bas de ton cheval, rends-toi ! » Sun-Tsan se trouble ; son arc, ses flèches lui échappent des mains ; son casque tombe ; les cheveux épars, il fuit vers les hauteurs lorsque son cheval manque des pieds de devant et il roule à terre au pied d’une colline. La lance en main, Wen-Tchéou va le frapper, quand un des trois officiers qui ont fui sort de derrière un monticule ; lui-même, sans casque ni cuirasse, il veut percer Wen-Tchéou de sa lance. Pendant que Sun-Tsan a gravi la hauteur, les deux adversaires s’abordent ; mais celui qui s’est jeté si inopinément dans la mêlée est un jeune officier inconnu ; il lutte sans reculer pendant longtemps, jusqu’à ce que Sun-Tsan étant secouru par ses troupes, l’ennemi se retire. Wen-Tchéou fuit en paix ; le vainqueur ne le poursuit pas.

Descendu de la hauteur sur laquelle il avait cherché un refuge, Sun-Tsan demande le nom de ce libérateur inattendu. C’est un jeune homme aux sourcils épais, aux yeux larges, au visage carré, au menton double, à l’aspect imposant et majestueux, un guerrier athlétique nommé Tchao-Yun (son surnom Tseu-Long), né au pays de Tchin-Ting, dans la province actuelle de Pé-King. — « Pourquoi es-tu venu à mon secours, lui demanda Sun-Tsan, et qui es-tu ? — Je suis, répondit l’officier, un des hommes de la suite de Youen-Chao, ton ennemi ; j’ai vu que mon maître ne songeait plus ni à soutenir la dynastie ni à