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LIVRE DEUXIÈME

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CHAPITRE PREMIER.[1]


Guerre des grands contre Tong-Tcho.


[Année 190 de J.-C.] Tchang-Fey était donc arrivé au galop jusqu’au pied du passage, mais on faisait pleuvoir d’en haut tant de flèches et de pierres qu’il revint sur ses pas. Au camp, Hiuen-Té, Kouan-Yu et lui reçurent les félicitations de tous les confédérés au milieu d’un festin d’honneur. La nouvelle de cette victoire fut portée au généralissime Youen-Chao, qui, plein de joie, écrivit bien vite à Sun-Kien de marcher ; celui-ci se mit en route la nuit avec ses troupes et deux de ses fidèles compagnons (Tching-Pou et Hwang-Kay).

Cependant l’ordonnateur de l’armée, Youen-Chu, s’avança au milieu du camp pour le saluer ; mais, tout en traçant des lignes sur la terre avec son bâton, Kien lui dit : « Je n’ai avec Tong-Tcho aucune inimitié personnelle, et voilà que je vais encore, sans me ménager, exposer ma vie à travers une grêle de traits et de pierres ; celui qui brave ainsi la mort sert l’État dont il attaque les ennemis, et aussi l’ambition particulière du général sous lequel il combat : or, le général, écoutant de perfides conseils, m’a refusé les vivres, les provisions dont j’avais besoin, et j’ai été battu par sa faute ! pourquoi a-t-il agi ainsi ? » Troublé par ces paroles, Youen-Chu ne répondit rien ; mais, pour

  1. Vol. I, livre II, chap. I, p. 1 du texte chinois.