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un entier dévouement. — Et moi, dit à son tour Youen-Chao, je ne veux point imposer ma volonté à ceux qui m’obéissent ; mais puisque vous m’avez honoré du titre de chef de la ligue, je saurai récompenser le mérite et châtier les fautes ! Dans l’empire, il y a des lois invariables ; dans l’armée, il y a une discipline constante : que personne n’ose l’enfreindre ! »

Tous jurèrent d’obéir, et Youen-Chao fit connaître qu’il avait chargé son frère Youen-Chu de veiller aux approvisionnements de l’armée. « Qui veut marcher en avant-garde et commencer l’attaque, demanda-t-il ensuite ; aller tâter le passage de Ky-Chouy, y attirer les troupes ennemies au combat ? Nous nous porterons tous sur d’autres points difficiles, pour soutenir ce premier effort. »

Ce fut Sun-Kien qui se présenta ; le généralissime le jugea capable d’occuper ce poste périlleux, et lui offrit une coupe de vin comme gage de son estime ; le guerrier courut droit au passage désigné avec ses propres troupes.

Arrivé au faîte du pouvoir, Tong-Tcho passait les jours et les nuits en orgies et en débauches ; les gardes du passage menacé vinrent en hâte donner avis de l’attaque à Ly-Jou, qui le transmit au premier ministre. Celui-ci, tout épouvanté, assemble ses généraux ; il leur annonce que les confédérés sont au pied du passage, et les consulte sur le parti à prendre. Liu-Pou (revêtu du titre de prince en récompense de sa trahison) calme les inquiétudes de son maître ; c’est lui qui se charge d’aller en reconnaissance au-devant des grands vassaux, misérable horde de poltrons ! il prendra avec lui ses tigres et ses lions, et rapportera leurs têtes à tous, qu’il suspendra aux portes de la capitale. « Avec un pareil chef d’avant-garde, je ne crains plus rien, » s’écrie Tong-Tcho tout joyeux.

« Pour tuer des poules, dit une voix derrière Liu-Pou, il n’est pas besoin d’un coutelas à égorger les bœufs ; il faut ici moins que la puissante valeur du noble prince ; c’est moi qui vais aller chercher les têtes de ces seigneurs rebelles, aussi facilement que je plongerais ma main dans un sac pour en tirer une chose quelconque ! » Tong-Tcho regarde, et voit un homme colossal,