Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 1, Duprat, 1845.djvu/145

Cette page a été validée par deux contributeurs.

délivrer la dynastie des maux qui pèsent sur elle ; je n’ai pu réussir, mais c’est le ciel qui l’a voulu…

— « Et quelle serait votre intention, maintenant ? — Retourner dans mon pays, et de là répandre aux quatre coins de l’Empire une proclamation qui engageât les grands à lever des troupes pour marcher contre le tyran ; est-ce que cette fois le Ciel ne me secondera pas ? »

À ces mots le petit mandarin délie les cordes qui entourent Tsao, le fait asseoir, lui verse du vin et s’écrie, après s’être incliné deux fois devant lui : « Vous avez des sentiments de loyauté et de justice ! j’abandonne mon poste pour vous suivre. — Vos noms ? demanda Tsao. — Tchin-Kong (mon surnom, Kong-Tay) ; ma mère, ma femme et mes enfants sont aussi dans le Tong-Kiun, je suis prêt à m’attacher à vos pas. Allez changer d’habits, prenez un autre cheval, et nous délibérerons sur la grande affaire qui nous occupe ; au milieu de la nuit mes dispositions seront entièrement prises. »

Et tous les deux, bien armés, bien montés, ils se mettent en campagne, faisant route vers leur patrie. Le troisième jour ils arrivent à Tching-Kao ; la nuit venait ; Tsao montre avec son fouet un hameau caché sous les forêts où vivait, disait-il, un certain Liu-Pa-Ché, frère adoptif de son père ; là il saurait des nouvelles de ce dernier, et il fut résolu qu’ils iraient demander l’hospitalité à cet ancien ami. Celui-ci, fort étonné de voir Tsao qu’il savait avoir été mis hors la loi, lui apprend que l’accusation portée contre lui a obligé son vieux père à fuir du village de Tchin-Liéou.

À son tour, Tsao raconte à son parent comment, sans le mandarin Tchin-Kong, il eût été mis en pièces. Liu-Pa-Ché salue celui-ci et le remercie du service rendu non seulement à Tsao, mais à toute la famille, qui eût péri avec lui ; puis il pria les fugitifs de vouloir bien s’arrêter une nuit sous son humble toit. « Malheureusement, leur dit-il, je n’ai pas chez moi de bon vin, permettez que j’en aille acheter au village, afin de vous traiter de mon mieux. » Le voilà qui s’éloigne, monté sur son âne ; mais bientôt Tsao entend repasser un couteau sur une