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« C’est Ho-Tsin, s’écria-t-elle, c’est mon frère, c’est ce stupide brigand qui a montré le chemin de la capitale au premier ministre Tong-Tcho ! c’est lui qui a attiré sur ma tête de si cruels malheurs ! » Une fois encore Ly-Jou pressa le prince détrôné d’avaler le poison. « Au moins, disait l’enfant, permettez que ma mère ne partage pas mon sort ! » Et dans cette douloureuse extrémité, il répéta les vers suivants :

« Le ciel nous conduit dans des voies changeantes, devais-je espérer un bonheur stable ! J’ai quitté les dix mille chars (la cour et son luxe) pour m’en aller en exil garder les frontières ; c’est un de mes sujets qui m’a réduit à cette extrémité ; mais la vie est courte ! devant la mort qui s’approche, vainement on verse des larmes ! »

Et tenant le petit empereur serré dans ses bras, la princesse Tang-Heou répondit à ses vers par ceux-ci :

« Si le ciel souverain s’affaisse, la terre reine aussi doit s’écrouler ; moi, femme d’un empereur, dois-je lui survivre ! La vie et la mort, ces deux voies opposées, nous auraient séparés, si nous les eussions suivies jusqu’au bout ; mais, dans la solitude où je devais marcher, mon cœur se fût consumé de tristesse. »

L’impératrice Ho-Heou et le jeune souverain pleuraient dans les bras l’un de l’autre. « Le régent attend que je lui rende compte de ma mission, interrompit Ly-Jou ; à quoi bon ces retards ? de qui espérez-vous des secours ? — Le tyran en veut au fils et à la mère, répondit Ho-Heou transportée de colère ; le ciel auguste pourrait-il lui prêter son appui ! Et montrant du doigt le meurtrier, elle ajouta : — Et vous qui vous associez à ses crimes pour partager sa fortune, vous périrez aussi avec tous les vôtres ! »

Hors de lui, Ly-Jou saisit l’impératrice, et dans sa rage, il la lança en bas du pavillon. Le petit empereur s’accrochait aux habits de l’assassin, et la jeune princesse Tang-Heou se jetait entre eux deux.

« Étranglez la femme, criait Ly-Jou aux soldats ; faites avaler le poison à l’enfant ! » Et il alla porter la nouvelle