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je veux parler de celui que vous regardez comme votre père, le vice-roi Ting-Youen, le premier magistrat de votre province.

— « Ah ! répliqua Liu-Pou après un moment de trouble, vous parlez de Ting-Youen ; oui, c’est lui qui me retient dans la triste position où je suis. — Un homme comme vous, frère plein de sagesse, qui serait capable de porter le ciel et de soutenir la mer, un homme comme vous, si brave qu’il n’a jamais tremblé devant personne au monde, à qui la réputation, la gloire, la fortune tendent la main, vous parlez de triste position ! et à quel homme êtes-vous inférieur ? — Je voudrais bien pouvoir employer toutes mes facultés, répondit Liu-Pou, mais le difficile, c’est de rencontrer un maître qui m’en donne l’occasion. — Oui, mais les oiseaux sages choisissent la branche sur laquelle ils se posent, et un serviteur habile le maître sous lequel il s’enrôle ! le beau printemps ne brille qu’une fois dans l’année, on se repent de n’en avoir pas su jouir, et il est trop tard !

— « Vous, vous êtes à la cour à même de voir les premiers hommes de notre époque ; eh bien, quel est le plus grand de tous ? — J’ai beau regarder, les passer tous en revue, je n’en vois pas un comme Tong-Tcho ! Voilà un homme qui sait honorer les sages, traiter avec égard les lettrés ; un homme d’une magnanimité sans bornes, d’une vertu sans apprêt, qui distribue avec discernement les châtiments et les récompenses ! il ne peut manquer d’arriver un jour à une magnifique position ! — Je voudrais bien m’attacher à lui, reprit Liu-Pou, mais comment faire ? »

À ces mots, Ly-Sou étala devant lui argent, pierreries, ceinture de jade. « Qu’est-ce que cela ? » demanda Liu-Pou presque épouvanté. Le suborneur fit reculer tout le monde et dit : « Mon maître, le vice-roi Tong-Tcho, a depuis longtemps apprécié les qualités de mon jeune et vertueux frère ; et il a voulu que je lui offrisse ces choses comme un présent qu’il lui fait par politesse. Le cheval est aussi donné par Tong-Tcho. — Vraiment ! le grand vice-roi Tong-Tcho m’aime à ce point ! Comment puis-je le remercier de tant de riches présents ? —