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rial, le même qui avait dénoncé à Ling-Ty les crimes des eunuques, douze ans auparavant) et le moniteur impérial Pong-Pé firent à haute voix l’éloge de Lou-Tchy. « Tout le peuple avait les regards tournés vers ce président des six Cours suprêmes, renommé entre les quatre mers par son savoir : commencer par tuer un si grand personnage ce serait soulever l’indignation générale ! » Tong-Tcho laissa donc partir son ennemi, qui alla chercher un asile au pays de Chang-Ko ; il se contenta de lui enlever son emploi. Là-dessus le commandant de l’infanterie, Wang-Yun fit encore observer qu’une question de déchéance ne pouvait s’agiter ainsi le verre à la main et qu’on devait ajourner la délibération.

Au moment où l’assemblée était dissoute, où chacun se retirait, l’ambitieux Tong-Tcho se tenait, armé de son sabre, aux portes de l’enclos, méditant toujours de se défaire des grands réunis sous sa main ; mais un cavalier arriva au même instant, brandissant sa lance. « Quel est cet homme ? » demanda Tong-Tcho à son affidé Ly-Jou. — Liu-Pou, le fils adoptif de Ting-Youen, contre qui personne n’ose lutter ! » Le projet de Tong-Tcho se trouvait manqué ; il se glissa furtivement dans quelque coin du jardin, et les mandarins purent sains et saufs regagner leurs demeures.

Dès le lendemain, Ting-Youen avait déployé ses troupes hors de la ville, et Tong-Tcho, averti de ces préparatifs de combat, sortit plein de rage avec les siennes. Les deux armées se trouvent en face l’une de l’autre ; Liu-Pou sort des rangs au galop, la tête ornée d’un bonnet étincelant d’or, vêtu d’une tunique de guerre aux broderies de mille couleurs, couvert d’une cuirasse dite Tang-Ny (cuirasse de lion du temps des Tang), le corps serré dans une étincelante ceinture faite de la peau d’un lion ; il est monté sur un cheval pesant, capable d’enfoncer les rangs ennemis ; dans sa main il tient sa lance redoutée ; il va et vient faisant caracoler son coursier, agitant ses armes, pareil à un esprit immortel. À sa vue Tong-Tcho est frappé de terreur ; Ting-Youen sort à son tour du milieu de ses escadrons, et montrant avec son fouet le chef ennemi, il l’ac-