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à celui-ci dès l’enfance et l’appelait son père ; aussi, debout derrière le siège de ce mandarin, il tenait à la main sa lance renommée. Ly-Jou le vit, et comprenant que ce héros serait prêt à défendre son maître, il se hâta de prendre la parole : « Ce n’était point ce jour-là, dit-il, au milieu d’un festin qu’on devait agiter les affaires d’État ; on s’assemblerait au palais, le plus tôt possible, dès le lendemain, pour régler cette grande question. »

Tous les mandarins engagèrent Ting-Youen à remonter à cheval ; suivi de Liu-Pou toujours armé de sa lance, le général sortit, non sans jeter un regard sur Tong-Tcho, qui, adressant de nouveau la parole à l’assemblée assise devant lui (car les grands étaient revenus après avoir conduit Ting-Youen jusqu’à la porte), demanda de nouveau ce qu’on pensait de sa proposition. Lou-Tchy se leva et dit : « Vos vues sont fausses ; autrefois, sous les Chang, Taï-Kia manquait de lumière, Y-Yn le confina au fond de son palais (appelé Tong-Kang) ; au temps des Han, Tchang-Y-Wang régnait depuis vingt-sept jours seulement, et il s’était déjà couvert de crimes ; Ho-Kwang convoqua les mandarins dans le grand temple des Ancêtres, et la déchéance du souverain fut proclamée. Le prince que nous avons choisi est jeune, il est vrai, mais il ne manque ni de vertu ni de sagesse, ni d’humanité ; peut-on lui reprocher la plus légère faute ? Vous êtes gouverneur d’une province située hors du territoire gouverné par le prince lui-même, et vous n’avez aucun titre pour régir les destinées de l’État. Vous n’êtes égal en talent à aucun des deux grands ministres que je viens de citer ; comment osez-vous vous arroger le droit de faire et de défaire des empereurs ? Les sages de l’antiquité ont dit : Déposer un prince d’après les sentiments de fidélité qui animaient Y-Yn, c’est bien ; mais déposer un prince sans être par les mêmes motifs, c’est usurper ! Eh bien, vous, que voulez-vous faire, sinon arracher l’Empire à la famille des Han ? »

Outré par ces paroles, Tong-Tcho se jetait sur Lou-Tchy l’épée à la main, mais Tsay-Yong (membre du conseil impé-