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nier fit part à son affidé Ly-Jou du projet qu’il méditait de détrôner le jeune empereur pour mettre à sa place Tchin-Wang ; et Ly-Jou lui conseilla de saisir le moment où l’Empire se trouvait sans chef, pour accomplir ce grand dessein. Plus tard, il pouvait survenir des changements. Il fallait donc que dès le jour suivant, Tong-Tcho réunît les mandarins civils et militaires dans le jardin du palais, et là il se déferait immédiatement de tous ceux qui lui refuseraient leur adhésion. « Autrefois, ajoutait-il, sous le dernier empereur de la dynastie des Tsin, un eunuque arrivé au faîte du pouvoir, montra un cerf à tous les mandarins assemblés, en disant : C’est un cheval ; et ceux qui osèrent dire : Non, c’est un cerf, il les fit périr : voilà l’exemple que vous devez suivre pour parvenir à être le seul maître ! »

Ce conseil plut beaucoup à Tong-Tcho, et il le suivit en tous points. Le lendemain un banquet étant préparé dans le jardin (dit Ouen-Ming, du pur éclat), l’invitation fut vite portée par des courriers à tous les mandarins présents dans la capitale ; et qui d’entre eux eût osé n’y pas répondre ? Quand il sut que tous ses convives étaient réunis, Tong-Tcho arriva tout doucement à cheval aux portes du jardin, mit pied à terre, et entra le sabre au côté. Les mandarins le reçoivent avec politesse ; il ordonne à ses serviteurs de prendre les amphores et de verser le vin à la ronde : quand ceux-ci ont plusieurs fois fait le tour de la table, il lève sa coupe, et invite à boire les principaux mandarins. Alors, interrompant les libations et imposant silence à la musique, il annonce aux conviés qu’il s’agit d’une affaire importante, et qu’ils doivent prêter l’oreille.

Les mandarins se penchent pour mieux entendre ; Tong-Tcho dit :

« Le fils du Ciel gouverne les dix mille peuples. Si sur la terre confiée à sa puissance, il n’y a ni autorité ni justice, on ne peut offrir de sacrifices ni dans la salle des Ancêtres, ni dans le temple des Esprits qui président aux céréales ! L’empereur défunt avait, par un ordre secret, exclu du trône son fils Pien, comme indigne de régner par la faiblesse de son esprit et son manque de lumières ; son second fils, Hié (Tchin-Wang), doué