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Ho-Tsin veut nous faire périr ! ayez pitié de nous, princesse ! » Et il versait un torrent de larmes.

La princesse lui promit sa protection, et faisant appeler son frère, elle lui dit à voix basse, quand il entra : « Vous et moi nous n’étions rien ; sans Jang et ses collègues, serions-nous aujourd’hui élevés aux premiers rangs dans l’Empire ! Un d’entre eux s’est montré pervers, et il a expié son crime. Mais quoi ! vous cédez à ceux qui vous demandent la mort des autres eunuques ! non, ce serait commettre une faute qui ternirait votre mémoire, une mauvaise action qu’il faut vous garder d’accomplir ! » Et gagné par les paroles de sa sœur, Ho-Tsin chercha à entraîner les autres mandarins ; il voulait faire périr, non tous les eunuques, mais la famille de celui qui avait cherché à l’entraîner dans le piége ; quant aux autres, à quoi bon les détruire ? Mais Youen-Chao criait toujours : « Si vous ne coupez pas l’herbe jusqu’à sa racine, un jour nous-mêmes nous serons exterminés ! — Et moi, dit violemment Ho-Tsin, j’ai une résolution arrêtée ; si vous parlez encore, c’est votre tête que je ferai couper !… » L’assemblée fut bientôt dissoute ; le lendemain la princesse nomma son frère président des six cours suprêmes, et elle se chargea de nommer aux emplois et aux magistratures.

Cependant, l’autre veuve de Ling-Ty, Tong-Heou, délibérait avec Tchang-Jang et le reste des eunuques. « Cette petite sœur du général en chef, disait-elle, c’est moi qui l’ai faite ce qu’elle est ; aujourd’hui son fils est proclamé empereur, les grands et les mandarins du palais se déclarent pour elle corps et âme ! son autorité grandit outre mesure, et moi, que vais-je devenir ? — Madame, répondit l’eunuque Jang, il faut monter sur le trône, abaisser le paravent impérial, régner par vous-même. Faites votre fils empereur ; votre frère Tong-Tchong, devenu le plus proche parent du souverain (à la place de Ho-Tsin), sera le premier des mandarins ; il aura l’armée sous sa dépendance ; qu’il nous élève aux grandes dignités, avec l’armée sous nos ordres, nous sommes les maîtres dans l’Empire, et bientôt nous pouvons ruiner le crédit de nos rivaux ! »