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soldats d’élite. On choisirait le successeur de Ling-Ty, on massacrerait les eunuques, et une fois la cour purgée de ces dix favoris, la paix serait rétablie dans l’Empire !

Celui qui parlait ainsi était un personnage remarquable dont les gestes et l’allure respiraient un certain air d’autorité ; supérieur parmi les gens de guerre, il savait honorer le talent et la vertu chez les lettrés ; aussi beaucoup d’entre ces derniers étaient sous son patronage. Depuis quatre générations, les trois grandes dignités avaient été remplies par des membres de sa famille ; il comptait parmi ses clients d’anciens magistrats. Né dans le Jou-Yang (province de Jou-Nan), petit-fils de Youen-Ngan, général d’infanterie, son nom était Youen-Chao, son surnom Pen-Tsou ; il avait le rang d’ordonnateur du palais.

Cet avis plut à Ho-Tsin ; il demanda bien vite les cinq mille soldats de la garde du souverain que Chao fit entrer, armé lui-même du casque et de la cuirasse ; alors accompagné de son frère et d’une trentaine des principaux mandarins, Ho-Tsin pénétra dans le palais réservé. Là, devant le corps inanimé de l’empereur, l’héritier présomptif Heou-Pien est proclamé et reconnu par tous les dignitaires présents. Après cette cérémonie, Chao s’enfonce dans le harem pour se saisir de Kien-Chy ; mais l’eunuque rusé avait rassemblé des troupes. Acculé au fond du palais, il essaie en vain d’arrêter son adversaire qui, d’un coup d’épée, le blesse mortellement ; il veut fuir, Chao le poursuit jusque dans le jardin. Là un autre eunuque (Kao-Cheng), sortant de derrière l’enclos, achève Kien-Chy, lui coupe la tête et s’esquive ; les soldats du palais qui avaient suivi le courtisan se rendirent aussitôt.

« Tous ces eunuques conspirent ensemble, dit Youen-Chao à Ho-Tsin ; il faut les exterminer ! » Mais déjà Tchang-Jang (le plus habile d’entre eux) se voyant dans une position à peu près désespérée, était allé implorer Ho-Heou (la sœur du général en chef, la mère de celui qu’ils avaient tenté d’exclure du trône) : « Un seul de nous avait médité la perte de votre frère, dit-il, un seul, c’était Kien-Chy ! en quoi sommes-nous ses complices ? Et voilà que, cédant aux instances de Youen-Chao,