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OMER. (Il rit.)

Pas grand’chose. Mon gros ! Pas grand’chose de beau. Il a bien dit ça. Tu vis tranquillement de tes petites rentes. Tu n’as pas le génie des affaires. Et tu t’en fiches, hein, mon gros ! (Sérieusement.) Eh bien, tu as tort. Pour toi, qui es un garçon un peu curieux, tu y trouverais des sensations… curieuses, des sensations de lutte. Et puis, peut-être que ça ne te déplairait pas, à la longue, de gagner de temps en temps quelques billets de mille francs ?

ALAIN.

Je crois bien. En ce moment, précisément, ça me serait fort agréable. (Après une hésitation.) Je suis très gêné.

FRANCINE, délibérément.

Nous sommes très gênés.

OMER.

Allons donc ! Vous êtes très gênés ? Ça n’existe pas, ces choses-là. J’admets que tu ne gagnes rien. Mais ton père te fait une rente. C’est que tu ne sais pas t’organiser, alors. Non, tu ne me feras pas croire que tu es gêné !

ALAIN.

C’est tellement vrai, que je voulais aller vous voir ces jours-ci pour vous demander un service. Oui, j’aurais voulu que vous me disiez où je pourrais trouver une douzaine de mille francs. Peut-être vous-même… pourriez-vous ?… (À part.) Allons ! ça y est ! c’est lâché !

OMER, subitement grave.

Alain, tu es mon ami ; c’est ce qui m’autorise à te dire franchement, sans ambages et sans détours : Non, non. Je n’ai pas actuellement de fonds disponibles. Mais j’en aurais que je te répondrais : Non, non. Un