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ALAIN.

Oui.

FRANCINE.

Eh bien ! il est deux heures et demie. Peut-être ne viendra-t-il pas ?

ALAIN.

Si on s’en allait ? On lui ferait dire par la bonne que nous l’avons attendu jusqu’à deux heures et demie, et que nous avons été obligés de sortir… pour une affaire d’honneur.

FRANCINE.

À quoi veux-tu que ça nous avance ? Il reviendrait ce soir. C’est un moment pénible à passer. Pince-toi le nez, et avale ça comme un verre d’eau purgative.

ALAIN.

S’il ne s’agissait que d’un moment pénible ! J’en ai passé bien d’autres. Mais c’est qu’il veut son argent, cet homme. Il recourra aux pires moyens, le protêt, la saisie, ce qui s’ensuit. C’est effrayant tout ça, quand on n’en a pas l’habitude. Je crois qu’il n’est plus en relations aussi suivies avec mon père. Il ne me ménagera pas.

FRANCINE, nerveusement.

C’est pas drôle, tout ça ! C’est pas drôle ! Cet homme qui va venir, qui va venir… (Brusquement.) Si je faisais un peu de musique.

Elle fouille dans une pile de partitions, placées sur le piano.
ALAIN.

Je vais lire un peu pour me distraire. (Il va à la bibliothèque.) Des vers pour lire aux femmes dans les moments délicats… Des poèmes pour soulager de