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Le sens de la déclaration de Lord John Russell, c'est qu'elle apprend au monde quel parti ces derniers ont pris, au sein de cette alternative. Lord John Russell peut bien invoquer un engagement pris vis-à-vis de ses camarades de la dernière heure, il peut bien invoquer je ne sais quel sens de l'honneur personnel, qui tiendrait à ne pas consentir au bien de son pays. Son pays n'y ajoute pas foi. Il avance ce qui n'est pas : il ne ressent pas les choses de cette manière, et n'observe pas non plus d'obligation semblable à celle qu'il évoque. Y croire serait une insulte ; ne pas y croire, non. Si cela était vrai, qu'en est-il de ses déclarations à Stroud[1] et dans le Devonshire,[2] de ces déclarations innombrables où il affirmait, d'un ton de plus en plus vigoureux, que si l'intimidation et la corruption continuaient d'aller leur train, sans pouvoir être empêchées autrement que par le vote à bulletin secret, il se trouverait dans l'obligation de soutenir cette réforme, quoique ce fût bien malgré lui ? A-t-il dit cela tout en se sachant à jamais dans l'impossibilité de la soutenir, tant au fond de son cœur qu'en tant qu'homme d'honneur ? Et il s'est trouvé des gens pour orner cet aveu d'une duplicité systématique ayant duré 3 ans, des épithètes de « franc » et de « viril ». Les Réformateurs ne croient pas que Lord John Russell soit un homme aussi mauvais que ce qu'il donne aujourd'hui à voir, par opportunité. Ils croient plutôt que c'est auparavant qu'il était sincère, et que l'histoire qu'il nous raconte à présent, d'après laquelle il serait pieds et poings liés, ne lui est venue qu'après-coup. Ils ne croient pas qu'il se sente empêché en quoi que ce soit dans le cours de sa politique, ni que ses opinions politiques aient à aucun moment tant de poids sur lui qu'elles ne puissent être remuées d'une saison sur l'autre. Ils sont convaincus que cette attitude qui est la sienne est un exemple, non de la ténacité dont (à en juger d'après son comportement durant cette session) il se prévaut, mais de la docilité qui caractérise sa carrière politique. Aujourd'hui comme auparavant, il se plie aux signes du temps. Seulement, malheureusement pour lui, il les lit à l'envers. Pour un même fait historique, il y a toujours deux lectures contraires qui sont possibles. Aux yeux des Réformateurs, la bonne lecture des dernières élections générales est que si les électeurs ne sont pas placés sous la protection du vote à bulletin secret, ou si on ne leur donne rien en vue de quoi ils puissent vouloir se battre, ils cesseront bientôt de consentir aux souffrances et aux sacrifices qu'ils endurent, simplement pour maintenir les ministres au pouvoir, et écarter les Tories. Mais les ministres ont interprété autrement ces mêmes faits. Leur lecture est que ce pays est en train de devenir Conservateur, et qu'ils doivent eux aussi le devenir : la déclaration de Lord John Russell en est le premier fruit.

Pour le moment, nous passerons sous silence ce que nous pensons de ces esprits hallucinés qui confondent l'apathie qui émerge des espoirs flétrissants, accompagnée de la répugnance croissante à encourir la ruine et la pénurie sans objectif national convaincant, avec une réaction de l'esprit public contre ces objectifs nationaux qui ne lui ont pas même été proposés.

  1. Voir John Russell, "Corrected Report of the Speech", pp. 10-11.
  2. Voir John Russell, "Speech at Torquay" (18 septembre, 1832), The Times, 21 Sept., 1832, pp. 3-4.