Page:Tharaud - Dingley.djvu/116

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

soir et dans la brume. Il était perdu loin de tout, loin de l’hôtel de brique et de bois où il dînerait à cette heure, si le démon qui le poussait à visiter ces campagnes ne l’avait entraîné dans cette forêt de pluie. Plus de ciel, plus de sol, plus de bruit ; et il serait tombé dans cette boue, s’il n’avait eu la certitude qu’un jour, dans un pays de soleil, le souvenir de cette course à travers ces solitudes noyées lui remettrait au cœur le désir nostalgique de venir encore une fois courber l’échine sous les averses d’Irlande… Soudain, il se trouvait transporté dans la maison d’un paysan qui ne possédait que deux lits : le sien et celui de ses deux filles. Le fermier les faisait lever. Dingley se couchait dans leurs draps chauds. La pluie battait toujours la maison. À travers la cloison de planches on entendait le rire étouffé des jeunes filles. Il s’endormait dans le bruit de leurs voix et la tiédeur de leurs corps…