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CHANTS DE L’ATLANTIQUE
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LE FLACON DE RHUM

À Pierre Camo.


Jadis, quand je vivais dans les îles en fleurs,
Ma jeune vie était de lumière inondée.
Qu’il m’est doux de pouvoir respirer leurs odeurs
Grâce aux ailes de feu d’une émouvante idée !



Flacon d’un rhum très vieux qu’un ami m’a donné,
Grâce à toi je refais mes voyages aux Îles.
— Hauteurs de Salazie ! Antilles ! Soirs tranquilles !
Le passé me revient net et coordonné.

Voici les champs de canne où l’on chante en cadence,
Où les longs coutelas coupent les blonds roseaux.
Voici la sucrerie où le vesou s’élance
Au sortir du moulin, dans un tumulte d’eaux.

Se peut-il, ô flacon, que dorment, sous ton verre,
Tant de beaux souvenirs et tant de beaux émois :
L’odeur de la bagasse et la houle des bois
Et l’encens du soir rouge où fume la chaudière ?