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autour d’un nom

sur les meubles de ta chambre. Victoire se plaint de ne pouvoir rien tenir en ordre chez toi. Pierre eut certainement préféré veiller au salon, mais un désir de Madame Durand était un commandement pour lui. Il se lisait bien un peu de contrainte sur sa figure : c’est gracieusement tout de même qu’il embrassa sa mère et dit au revoir à M. James.

« Au revoir » ! Pour la première fois, cet adolescent allait goûter l’amertume des « au revoir » sans lendemain. Les enfants élevés exclusivement par la mère, quand cette mère se trouve être une femme d’un grand cœur et d’un jugement sain, sont ordinairement excessivement bien doués. Trop délicats pour engager avantageusement la bataille de la vie, ils ressentent plus que d’autres les chocs qu’ils en reçoivent, mais ils ont, par contre, la supériorité — douloureuse il est vrai — mais supériorité quand même des sensitifs.

M. James s’approcha de Madame Durand.

— Je crains, dit-il, que vous n’ayez été plus malade que ne l’a dit Pierre. Vous êtes d’une pâleur qu’il m’est pénible de constater. Je ne veillerai pas tard.

Comme elle ne répondait pas :

— Désirez-vous que je me retire immédiatement ?