Page:Textes choisis (Leonardo da Vinci, transl. Péladan, 1907).djvu/94

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que et n’engendre pas des filles qui l’égalent. Et cette singularité la rend plus excellente que les choses qui sont publiées pour tous.

Ne voyons-nous pas les grands rois de l’Orient aller, voilés et le visage couvert, par croyance qu’ils diminueront leur prestige à rendre publique leur présence et à se montrer ? Or, ne voit-on pas les peintures qui représentent les divines Déités être tenues couvertes avec des rideaux de très grand prix ? On ne les découvre que dans les grandes solennités de l’Église au milieu des chants et de la musique ; et dès qu’on les découvre, la grande multitude du peuple qui est accourue, se jette aussitôt à terre et adore et prie, car de telles peintures passent pour rendre la santé perdue et donner le salut éternel, aussi bien que si cette déité fût vivante et présente.

Cela n’arrive dans nulle autre science et pour aucun autre ouvrage humain. Et si tu prétends que ce n’est pas la puissance du peintre qui agit, mais l’idée attribuée à la chose représentée, je te dirai qu’en ce cas l’imagination humaine se peut satisfaire, en restant couché, au lieu d’aller dans des endroits pénibles et périlleux, comme on le voit faire, pour les pèlerinages.

Si néanmoins ces pèlerinages ont lieu continuellement, qui les décide, sans nécessité ? Certes tu confesseras que ce simulacre fait une chose impossible à l’écriture, en figurant l’effigie