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la capacité du FLN à déjouer les manœuvres politiques et les traquenards de l’appareil policier français.

Cela ne saurait signifier que toutes les difficultés seraient complètement effacées.

Notre action politique a été handicapée au départ pour les raisons ci-après :

1°) L’insuffisance numérique des cadres et des moyens matériels et financiers.

2°) La nécessité d’un long et dur travail de clarification politique, d’explication patiente et persévérante pour surmonter une grave crise de croissance.

3°) L’impératif stratégique de SUBORDONNER TOUT AU FRONT DE LA LUTTE ARMEE.

Cette faiblesse, normale et inévitable au début, est déjà corrigée, après la période où il se contentait de lancer uniquement des mots d’ordre de résistance à l’impérialisme, on a assisté à une réelle apparition du FLN sur le plan de la lutte politique.

Ce redressement fut marqué par la grève d’anniversaire du 1er novembre 1955, considérée comme l’événement décisif, tant par son aspect spectaculaire et positif que par son caractère profond, preuve de la « prise en main  » de toutes les couches de la population.

Jamais, de mémoire d’Algérie, aucune organisation politique n’avait obtenu une grève aussi grandiose dans les villes et villages du pays.

D’autre part, le succès de la non-coopération politique lancée par le FLN est non moins probant. La cascade de démissions des élus patriotes suivie de celles des élus administratifs ont imposé au gouvernement français la non-prorogation du mandat des députés du Palais Bourbon, la dissolution de l’Assemblée Algérienne. Les conseils généraux et municipaux et les djemaa ont disparu, vide accentué et amplifié par la démission de nombreux fonctionnaires et auxiliaires de l’autorité coloniale, caïds, chefs de fraction, gardes champêtres. Faute de candidatures ou de remplaçants, l’administration française est disloquée; son armature considérée comme insuffisante ne trouve aucun appui parmi le peuple; dans presque toutes les régions elle coexiste avec l’autorité du FLN.

Cette lente mais profonde désagrégation de l’administration française a permis la naissance puis le développement d’une dualité de pouvoir. Déjà fonctionne une administration révolutionnaire avec des djemaa clandestines et des organismes s’occupant du ravitaillement, de perception d’impôts, de la justice, du recrutement de moudjahidine, des services de sécurité et de renseignements. L’administration du FLN prendra un nouveau virage avec l’institution des assemblées du peuple qui seront élues par les populations rurales avant le deuxième anniversaire de notre révolution.

Le sens politique du FLN s’est vérifié d’une façon éclatante par l’adhésion massive des paysages pour lesquels la conquête de l’indépendance nationale signifie en même temps la réforme agraire qui leur assurera la possession des terres qu’ils fécondent de leur labeur.

Cela se traduit par l’éclosion d’un climat insurrectionnel qui s’est étendu avec rapidité et une forme variée à tout le pays.

La présence d’éléments citadins, politiquement mûrs et expérimentés, sous la direction lucide du FLN, a permis la politisation des régions retardataires. L’apport des étudiants a été d’une grande utilité, notamment dans les domaines politiques, administratif et sanitaire.

Ce qui est certain, c’est que la Révolution Algérienne vient de dépasser avec honneur une première étape historique.

C’est une réalité vivante ayant triomphé du pari stupide du colonialisme français prétendant la détruite en quelques mois.

C’est une révolution organisée et non une révolte anarchique.

C’est une lutte nationale pour détruire le régime anarchique de la colonisation et non une guerre religieuse. C’est une marche en avant dans le sens historique de l’humanité et non un retour vers le socialisme.

C’est en fin la lutte pour la renaissance d’un Etat Algérien sous la forme d’une république démocratique et sociale et non la restauration d’une monarchie ou d’une théocratie révolues.

c. La faillite des anciennes formations politiques.

La Révolution Algérienne a accéléré la maturité politique du peuple algérien. Elle lui a montré, à la lumière de l’expérience décisive du combat libérateur, l’impuissance du réformisme et la stérilité du charlatanisme contre-révolutionnaire.

La faillite des vieux partis a éclaté au grand jour.