Page:Tessan - Le Japon mort et vif, 1928.pdf/73

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui a dérouté ceux qui ont accoutumé de n’admirer les Japonaises que sous la forme de fleurs précieuses ornant banquets et festins, ou dans leurs fonctions de modestes compagnes du foyer.

En 1905, quand M. Suzuki mourut, sa veuve hérita d’une petite fabrique de sucre. Jusque là, Mme Suzuki avait mené l’existence sans apparat d’une épouse soumise ne se mêlant point des affaires industrielles de son mari. Personne, dans le monde de la haute finance, ne la connaissait. Dès qu’elle fut maîtresse de la petite fortune qui lui avait été léguée, elle se révéla sous son véritable jour : une femme aux idées débordantes, jamais satisfaite de son gain, prête aux plus ambitieuses conquêtes.

Non seulement Mme Suzuki développa d’une manière considérable sa sucrerie mais, peu après, elle y adjoignit une distillerie, puis une brasserie. Elle fonda une banque pour faciliter ses opérations de crédit. Tout l’intéressait, tout tentait son activité. Elle devint l’âme ou la commanditaire d’une société d’assurances, d’une compagnie d’affrêtement, d’une flotte de commerce, d’ateliers métallurgiques, de minoteries, de plantations de cotonniers, d’une fabrique de celluloïd. En moins de dix ans, cette extraordinaire Japonaise s’était taillé une part de lion dans quelques-uns des groupes les plus importants et les plus réputés de son pays.

Pendant la guerre, elle se livra à des spéculations sur les riz et sur les denrées alimentaires qui multiplièrent son avoir. Elle fut, du reste, honnie du peuple. Les bureaux du consortium