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en 1889 ! Ils ont montré, depuis cette époque, qu’ils étaient capables, tout en cultivant les arts traditionnels, de devenir une puissance mondiale. Cette constitution dont se moquait Rudyard Kipling, ils l’ont maintenue et ils en ont perfectionné les rouages. Sans doute, la politique ne leur a pas réservé que d’agréables surprises. Ils ont vu se produire d’immorales combinaisons, éclater de retentissants scandales, se multiplier des crises qui ont jeté le trouble dans les esprits. Leur éducation politique et parlementaire leur a fait subir un certain nombre d’épreuves. En trente-six ans, n’a-t-on pas compté cinquante et une sessions par suite des nombreuses dissolu tions de la Diète et des convocations extraordinaires ? Et nous ne sommes pas au bout des opérations politiques de ce genre : la sagesse parlementaire et le fonctionnement des droits constitutionnels ne s’acquièrent que grâce à une assez longue tradition libérale.

Or, le Japon vivait dans un état de féodalité, il y a seulement soixante-quinze ans ! Les clans qui, naguère, gouvernaient le pays, ont été les premiers à s’adapter au nouveau système et à en retirer les profits immédiats. Encore aujourd’hui, leur puissance subsiste et ils sont loin d’avoir abdiqué devant les courants populaires qui ne sont pas disciplinés par des leaders suffisamment habiles ou ne possédant point une autorité assez décisive. Mais, en dépit de tous ces tâtonnements et à travers toutes les embûches, l’esprit public se forme ; les aspirations, d’abord confuses, de Ja masse deviennent plus claires ; le désir de pro-