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plus furieusement peut-être que les groupements occidentaux. Comment marier l’ascétisme et le fatalisme hindou à la déliquescence chinoise et à l’énergie farouche des Nippons ? Comment réaliser l’harmonie de tempéraments aussi contraires ? Comment faire la part de l’utopie et de ce qui est pratique ? Sur quelles bases instituer la coopération des peuples asiatiques dont l’évolution n’a pas suivi les mêmes rythmes ? Tel est le problème.

Au moment de la guerre des Boxers, vers 1900, retentissait déjà le cri : « L’Asie aux Asiatiques ». Il a été bien des fois répété depuis. De nombreux écrivains ont tenté de formuler une doctrine offrant un faisceau d’arguments en faveur d’une confédération panasiatique qui contrebalancerait la puissance du monde occidental. Dans son livre sur les Idéaux de l’Orient, Okakura Kakuzo s’est efforcé de montrer les liens créés par la religion, la morale et l’art pratiqués chez les peuples répartis entre le Golfe de Bombay et le Pacifique, entre l’Océan Indien, la Vallée du Fleuve Bleu, les steppes de Mongolie et de Mandchourie et l’archipel nippon. Il est remonté aux sources communes de la civilisation qui anime encore l’Inde, la Chine, la Corée et le Japon, et il a conclu que les forces spirituelles qui les inspiraient étaient suffisamment intenses pour permettre la reconstitution d’une grandiose famille asiatique. Cependant, Okakura Kakuzo ne donne pas, dans ses projets, un rôle égal à chacune des nations de cette ligue. Il la voit présidée par le Japon. C’est sous l’égide de l’Empire