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une apothéose de fulgurances, une transformation de la ville en champ de bataille où tout était meurtri, déchiré, tordu, confondu comme par l’effet d’une artillerie géante !

Notre ambassadeur, M. Paul Claudel, a écrit ses impressions sur ces tragiques journées et il a dit « cette chose d’une horreur sans nom de voir, autour de soi, la grande terre bouger comme emplie tout à coup d’une vie monstrueuse et autonome… C’est comme si l’on voyait une personne sur qui l’on a toujours compté qui, tout à coup, travaille pour son propre compte et s’abandonne — sans égards pour nous — aux convulsions du délire et de l’agonie ».

Notre représentant au Japon nous a, également, tracé ce tableau de Yokohama en pleine détresse : « Cela commence par des espèces de chaînes de montagnes incandescentes qui sont les parcs de charbons incendiés, et cela a pour fond un demi-cercle de collines d’une braise presque uniforme historiée çà et là de flammes plus claires. Dans l’intervalle, sur une étendue de je ne sais combien de kilomètres carrés, tout brûle ! Une vapeur ardente flotte sur cette cuve qu’attisent encore, par bouffées véhémentes, les derniers souffles du typhon qui expire. De temps en temps, une détonation, une flamme immense qui monte au ciel : c’est un gazomètre qui saute, un dépôt de produits chimiques qui vient d’être touché. Et tout le temps, ce brasillement ininterrompu, pareil à l’innombrable conversation d’une foule, ce bruit de feu que nous connaissons tous quand nous allumons dans notre che-