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quoi cet homme, si fidèles, si sages, et qui avaient rendu tant de services à l’Église, ont-ils passé au parti adverse ? — [3] Celui qui pose pareille question ne peut-il se répondre à soi-même que ceux que l’hérésie a su pervertir ne doivent donc être considérés ni comme sages, ni comme fidèles, ni comme éprouvés ? Est-il donc si surprenant que des gens d’une vertu qui, d’abord, avait fait ses preuves, tombent finalement ? [4] Saül, bon entre tous, se perd ensuite par jalousie. David, dont la bonté était selon le cœur du Seigneur, se voit ensuite convaincu de meurtre et d’adultère. Salomon, après avoir reçu de Dieu tous les dons de grâce et de sagesse, est entraîné à l’idolâtrie par les femmes. [5] Il n’appartenait qu’au seul fils de Dieu de demeurer constamment sans péché. Eh quoi ? si un évêque, si un diacre, si une veuve, si une vierge, si un docteur, si un martyr même, s’écartent de la règle, faudra-t-il pour cela que l’hérésie devienne vérité ? [6] Jugeons-nous de la foi d’après les personnes ou des personnes d’après la foi ? Nul n’est sage, nul n’est fidèle, nul n’est grand, s’il n’est chrétien ; mais nul n’est chrétien, s’il ne persévère jusqu’au bout. [7] Toi qui n’es qu’un homme, tu ne connais les gens que par le dehors ; tu crois ce que tu vois, mais tu ne vois qu’aussi loin que porte ton regard. Mais « le regard du Seigneur est profond », dit l’Écriture. « L’homme ne voit que la figure, Dieu pénètre jusqu’au cœur. » [8] Et c’est pourquoi « le Seigneur connaît ceux qui sont les siens, et il arrache la plante qu’il n’a pas plantée ». Il nous montre que les premiers sont parfois les derniers et il tient en main un van pour nettoyer son aire. [9] Que la paille de la foi légère s’envole à son