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surérogatoire, labeur de luxe, — au lieu de jouir paisiblement de la possession de la vérité, en suivant de loin, avec un sourire de tranquille ironie, les imprudents qui la cherchent encore ?

Puis, à se refuser perpétuellement à toute discussion sur le fond avec les hétérodoxes, ne finirait-on pas par déterminer en eux la certitude que ce déclinatoire n’était au fond qu’un abri tutélaire pour l’ignorance, qu’un moyen commode de pallier le défaut d’arguments valables ? Quel dommage alors pour les sincères qui pourraient se trouver parmi eux !

Ces inconvénients divers de la tactique qu’il préconisait, il n’est pas douteux que Tertullien ne les ait entrevus. S’il l’avait crue véritablement décisive, il aurait eu un parti très simple à prendre : celui d’éluder en toute occasion la controverse avec les hérétiques. Or à la fin même du De Praescriptione, il annonce des polémiques spéciales contre telle ou telle hérésie : etiam specialiter quibusdam respondebimus. Et l’on sait s’il a tenu sa promesse, et ce qu’il a dépensé d’érudition, de verve et d’éloquence pour réduire les plus dangereuses d’entre elles.

Au cours de ces traités contre les hérétiques, il lui est arrivé maintes fois d’invoquer l’argument de prescription[1]. Mais, notons-le, il est exceptionnel

  1. Voici la liste des principaux passages où Tertullien le met en valeur (ailleurs que dans le De Praescriptione) :