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n’oserais m’en contenter. Pourquoi Tertullien aurait-il laissé subsister lors de la dernière révision une phrase qui avait cessé d’être tout à fait exacte et qu’il lui eût été si aisé de mettre au point[1] ?

Le plus simple n’est-il pas d’admettre que Tertullien se place en pensée au point de vue du lecteur qui n’aurait pas déjà pris connaissance du De Praescriptione ? « Cette thèse de la priorité de la vérité sur l’erreur, je ne la développe pas ici : si vous voulez la voir dans son ampleur, reportez-vous au De Praescriptione, vous l’y trouverez illustrée de tous les arguments qu’elle comporte. » Voilà à peu près le raisonnement qu’implique ce futur sustinebit[2].

Au surplus, lors même qu’on contesterait la

  1. M. Schanz [Gesch. der röm. Litter., Dritter Theil, 2e éd., p. 328] suivi par Harnack [Chronol., II, 261, note] remarque aussi qu’à la fin même du De Praesc. Tertullien annonce des polémiques spéciales contre telle ou telle hérésie : etiam specialiter quibusdam respondebimus ; et qu’il serait assez étrange qu’il n’eût fait là aucune allusion à son Adversus Marcionem, si ce traité était réellement, en sa forme première, antérieur au De Praesc. Mais il me paraît peu correct de faire état de cet argument : car est-il bien sûr que Tertullien ait livré au public cette première rédaction un peu bâclée, de son propre aveu ? Et s’il l’avait gardée par-devers lui, pourquoi en aurait-il parlé dans le passage en question ?
  2. Cf. telle expression analogue, comme « Sed et Johannes docebit… », De Pudic., II, 14 [éd. de Labriolle, p. 66].